Cadenza, pour piano et ensemble, est le résultat d'une conjonction d'éléments structurés, pressentis, extraits et imaginés.
Différents modes de composition sont intervenus pour aboutir à cette sorte de « concert allegro » : des formes aux perspectives impossibles — le « Trompe l'œil » de la dernière partie, où le piano presto décrit une ligne qui, en s'ouvrant, crée une harmonie illusoire — jusqu'au dialogue classique entre piano et ensemble instrumental, et son affrontement forte. L'œuvre, d'une durée moyenne, pour ne pas dire brève, n'en est pas moins intense. Tout le mouvement, débutant par un cantabile, suit une trajectoire, tant du point de vue de la microforme que de celui de la macroforme, fondée sur un seul élément composé de trois notes. Cette trajectoire passe par des moments de plus grande virtuosité où les mélodies de trois notes se mêlent aux diverses voix alors que des torrents triédriques se déversent et chutent en cascades.
La pièce s'ouvre ainsi, sur ce premier accord de l'ensemble. Ce même accord génère les intervalles qui, en mesures successives, créent l'élément de trois notes sur lequel toute l'œuvre va s'appuyer. L'introduction de l'ensemble donne suite à une longue ligne mélodique du piano, reprise de l'élément généré plus tôt. Le piano le développe en incorporant à la base tripartite le même élément, cette fois amplifié sous diverses formes simultanées. Puis le mouvement cède à nouveau le pas aux instruments intégrés les uns après les autres, développant encore le même élément sous une forme rythmique ou mélodique.
Ce type de traitement est utilisé pratiquement tout au long de l'œuvre mais prend des nuances et caractéristiques différentes. Pour contraster avec cet élément, le piano apparaît avec un nouveau marcato, constitué de suites d'accords de demi-croches incorporant les demi-triples-croches et lançe le dialogue avec les cordes dans une ascension vertigineuse. Le piano reprend ensuite en multipliant le schéma initial (3 x 3), et atteint le presto final dans une atmosphère brillante et nerveuse.
Et maintenant, laissons parler la musique.
Jesus Rueda, programme du concert de création, 4 décembre 1997, Espace de projection de l'Ircam, Paris