« On peut décrire mes compositions de musique électroacoustique numérique comme étant constituées de myriades de sons de différentes tailles, couvrant une variété d’échelles temporelles. Ces sons circulent et interagissent au sein d’un réseau contenant divers types de représentations encapsulées sous forme d’objets numériques ou de codes. De ce fait, il y a un jeu de correspondances et de rappels, avec des miroirs qui réfléchissent de près ou de loin et peuvent être plus ou moins linéaires ou déformants. Le réseau lui-même est défini et redéfini constamment tout au long du processus de composition. Beaucoup de sons composés dépendent essentiellement des conditions et des opérations effectuées à des échelles de temps microscopiques, appartenant au domaine du micro-temps. Concernant ce domaine, on peut établir sa bordure supérieure (en étant cependant prudents, car cette frontière peut varier selon les attributs morphologiques des sons impliqués) en dessous d’un seuil d’environ 100 millisecondes. Quant au bord inférieur, il se trouve au niveau de l’échantillon numérique individuel. Cette dernière frontière montre que poursuivre ou postuler une « divisibilité infinie » du temps n’est pas ici quelque chose de pertinent : nous cherchons une pragmatique musicale plutôt que des modèles externes, physiques ou autres (surtout pas de « quanta sonores » !), nous voulons construire une extension des opérations de composition applicables à un domaine temporel spécifique autrefois hors d’atteinte, devenu disponible grâce à la digitalisation du son.
Mais travailler dans le domaine du micro-temps ne signifie pas opter uniquement pour une approche ascendante (bottom up) : la stratégie inverse est également constamment présente, indépendamment de tout ordre linéaire, conforme à des perspectives et contextes morphologiques divers. L’œuvre musicale est donc le résultat de nombreuses opérations de fragmentation et d’agglutination, réalisées à de nombreuses échelles de temps différentes ».
Horacio Vaggione : Notes Portrait Konzert, Université de Cologne, Allemagne, mars 2009