Zad Moultaka commence le piano à l’âge de cinq ans et étudie au Conservatoire de Beyrouth auprès de Madeleine Médawar. En 1984, chassé par la guerre, il s’installe à Paris et poursuit ses études musicales au Conservatoire de National Supérieur de Musique et de Danse de Paris où il obtient ses premiers prix de piano et de musique de chambre à l’unanimité. Il entame alors une carrière de soliste qu’il abandonne en 1993 pour se consacrer à la composition et à la peinture.
Ses œuvres – musique chorale, musique d’ensemble, musique de chambre, musique vocale soliste, opéra, électroacoustique et installation – intègrent les données de l’écriture contemporaine occidentale aux caractères spécifiques de la musique arabe (monodie, hétérophonie, modalité, rythmes, vocalité, …).
Zad Moultaka collabore avec de nombreux ensembles et orchestres, tels que 2e2m, Ars Nova, Sillages, Accroche note, Musicatreize, L’Instant Donné, le Netherland Radio Choir, l’ensemble Schönberg d’Amsterdam, le Nouvel Ensemble Moderne de Montréal, le Neue Vocalsolisten Stuttgart, le chœur de chambre Les éléments et l’Orchestre National de Lorraine.
Zà rani (2002), commande du Festival de Beiteddine, propose une relecture des mouwashahs traditionnels (chant, oud et percussions), contrariés et prolongés par la présence d’un piano. Cette œuvre marque un tournant dans l’écriture du compositeur et offre une synthèse entre l’écriture occidentale, la linéarité mélodique et les échelles propres aux modes orientaux.
En 2004, plusieurs pièces sont créées au Festival des 38e Rugissants de Grenoble par l’ensemble Ars Nova et le chœur de chambre Les Eléments : Fragment B118 (sur un texte d’Empédocle) s’inspire des chants syriaques anciens ; Enluminures, pour neuf voix de femmes, sur des poèmes de Georges Schehadé, réflexion sur la nature profonde de l’exil, emprunte aux traditions populaires du monde rural certaines techniques vocales (cris des bergers, zalaghyt – sorte de cris caractéristiques des femmes qui chantent pendant les mariages – et chants de funérailles) ; Fanà riki, concerto pour cymbalum et ensemble instrumental, est articulé autour du texte Sept chants de guerre du poète russe Ivan Silinski.
Zajal son premier opéra créé par la soliste Fadia Tomb El-Hage et l’ensemble Ars Nova sous la direction de Philippe Nahon, est un hommage moderne à la traditon du Zajal, forme de poésie populaire et de joute oratoire méditerranéene. Cette œuvre interroge la mémoire collective et pose la question de la relation entre tradition et modernité, réflexion sur les racines populaires, en même temps que sur la possibilité d’une forme d’opéra arabe.
En 2013, il reçoit deux commandes de Radio France pour le Festival Présences et Alla Breve : dans Callara I, inspiré de textes précolombiens annonçant la fin du monde et de la civilisation maya, un quatuor à cordes vient s’enrouler autour du chant humain d’un alto soliste, et dans Il Regno dell’Acqua, pour ensemble de chambre, chacun des cinq mouvements de la pièce est consacré à un des ses aspects de Venise sur les thèmes de l’eau et de la lumière.
En 2004, avec Catherine Peillon, il fonde Mezwej, ensemble instrumental et vocal à géométrie variable, qui a pour vocation l’exploration des langages de la musique occidentale et de la musique arabo-orientale. Accueilli en résidence à la Fondation Royaumont de 2007 à 2009, à l’Arsenal de Metz en 2017 et 2018, Mezwej a généré un cinquantaine d’œuvres d’une douzaine de compositeurs, dont Moultaka avec notamment La Passion selon Marie (2011), oratorio syriaque contemporain pour soliste, chœur mixte et ensemble instrumental baroque, et La Passion d’Adonis (2015) pour oud, violon, percussions et électroacoustique, sur des textes du poète syrien Adonis.
À l’occasion de Nuit Blanche 2016, Zad Moultaka compose Montée des ombres, une procession d’une centaine de chanteurs, emmenée par douze membres de Musicatreize dans le tunnel des Tuileries, immerge les visiteurs dans des sons de terre et d’eau diffusés par haut-parleurs tandis que, le long des murs, des écoulements d’eau font surgir des personnages fantomatiques.
UM souverain moteur de toute chose, commande de l’Ircam, du Festival d’Ile de France et d’Ars Nova, pour six chanteurs, onze instrumentistes et électronique, méditation sonore inspirée du Livre des morts tibétain, est créé en octobre 2016 au Théâtre Jean-Vilar.
Zad Moultaka est en résidence à l’Institut du Monde Arabe pour la période 2016-2018 et à l’Arsenal de Metz pour l’année 2017-2018.
Parrallèlement à son activité de compositeur, Zad Moultaka poursuit une carrière de plasticien et est exposé dans plusieurs villes (Beyrouth, Abou Dhabi, Venise, Paris). En 2017, il est mandaté par la Ministère de la Culture du Liban pour créer le Pavillon Libanais à la 57e Biennale de Venise.
Le geste pictural de Zad Moultaka et sa recherche musicale s’articulent autour de motifs et de questionnements communs : l’histoire, la guerre, la mémoire, le monde contemporain et l’interrogation des frontières entre visible et invisible.
Ses œuvres sont éditées par les éditions Onoma. Plusieurs ont été gravées par le label L’empreinte digitale.