Introduction
Résumé
Songes (1979) de Jean-Claude Risset est emblématique des premières années de création musicale à l’Ircam. Il s’agit d’une pièce fixée sur bande dans laquelle le compositeur associe des sons de synthèse générés par l’ordinateur, et des sons instrumentaux enregistrés puis traités. Cette analyse propose une immersion dans les matériaux génétiques de l’œuvre, en l’occurrence les codes informatiques originaux écrits en langage Music V. Il s’agit d’une analyse prospective, car le lecteur est invité, grâce aux applications web-audio en langage Faust, à jouer avec les codes de Jean-Claude Risset, en les modifiant et en se les appropriant.
Après avoir rappelé le parcours scientifique et musical du compositeur, nous proposons une analyse en détail de la pièce Songes. Des notions récurrentes en jeu dans la production musicale de Jean-Claude Risset sont privilégiées dans cette analyse, comme celles du simulacre de cloche, de l’illusion de l’espace, des apports de la psychoacoustique. À ces notions-phares s’ajoutent des notions propres à Songes, comme les relations intervalliques et l’espace de timbre. De nombreuses animations et exemples musicaux accompagnent le lecteur dans cette découverte interactive de la pièce.
Risset, un compositeur-chercheur
Jean-Claude Risset est né le 13 mars 1938 au Puy-en-Velay et est décédé le 21 novembre 2016 à Marseille. Au début des années 1960, agrégé de physique à l’Ecole Normale Supérieure à Paris, il mène des recherches mêlant sa formation scientifique avec ses projets de compositeur, premières bases d’une articulation art/science aidée en cela par les progrès technologiques de l’époque. L’intérêt du compositeur pour la musique commence dès la petite enfance. Influencé par ses parents mélomanes qui possédaient un piano, Risset reçoit avant l’âge de six ans ses premières leçons particulières. À l’adolescence, son professeur Robert Trimaille (ancien élève d’Alfred Cortot) lui fait jouer des pièces de Claude Debussy (entre autres compositeurs) [EV Dars et Papillault, 1999] en orientant l’interprétation vers la recherche du phrasé et du timbre. L’écoute de “l’intérieur du son” consistait à doser les différentes intensités des notes d’un accord [Veitl, 2010, p.156]. Cette prise de conscience, dans un premier temps par le biais du travail sur le piano, l’incite à concevoir le son comme un phénomène acoustique. Ensuite, au fil de son parcours à la fois musical et scientifique, Risset entame une longue recherche artistique qui vise à explorer l’intérieur de l’objet sonore.
Au départ, ma formation scientifique et ma formation musicale ont été complètement séparées. Quand je préparais les grandes écoles, j’ai refusé d’arrêter de travailler mon piano, non pas du tout parce que je pensais faire la synthèse entre la musique et les sciences, mais parce que c’était pour moi une passion et aussi un véritable dérivatif, une activité complètement différente, et qui compensait un peu l’aridité de l’étude des sciences. [Guillot, 2008, p. 27]
Cette recherche de la “composition du son lui-même”, telle qu’on la retrouvera quelques années plus tard avec la musique spectrale, semble provenir de la rencontre en 1962 avec André Jolivet, lors de l’Académie d’Été du Centre Français d’Humanisme Musical à Aix-en-Provence. Ce dernier avouait d’ailleurs composer avec des sons en plus de composer avec des notes, suite à sa rencontre avec Edgard Varèse. On peut tirer ainsi une filiation Varèse-Jolivet-Risset dans ce rapport de la note et du son, à travers cette tension vers l’exploration de l’intérieur des sons – que l’on retrouve également chez l’anglais Jonathan Harvey, et la plupart des musiciens dits “spectraux”. À la suite de cette rencontre, une pièce orchestrale de Risset est jouée en 1963 par l’orchestre de Marseille. Le jeune compositeur poursuit alors des études d’écriture, d’harmonie et de contrepoint avec Suzanne Demarquez, et de composition et d’orchestration avec Jolivet. Il s’intéresse aussi aux innovations technologiques appliquées au son et découvre une publication de Max Mathews abordant le potentiel de l’informatique musicale [Mathews, 1963]. Grâce à sa double activité scientifique et musicale, il rejoint le père de la synthèse sonore par ordinateur aux Bell Telephone Laboratories en 1964 [EV Risset, 2016] et entame un travail de recherche sur l’imitation des sons cuivrés dont le premier résultat est l’objet de sa thèse de doctorat. À la suite de cette recherche, Risset s’intéresse davantage à la création musicale dans une perspective de l’alliage art/science/technologie.
Mon activité scientifique, commencée en physique nucléaire, s’est surtout exercée dans les champs de l’acoustique et de l’informatique musicale et de l’étude de la perception auditive. La plus grande partie de mon travail scientifique est liée à des motivations musicales: mais parfois la musique a été l’occasion, le terrain d’étude, d’une investigation purement scientifique. [Risset, 1991, p. 274]
Entre 1968 et 1969, il réalise par synthèse numérique deux œuvres substantielles, Computer Suite from Little Boy (1968) et Mutations (1969), cette dernière étant une commande de l’Ina-GRM. Dans ces pièces, le compositeur propose comme matériau des sons quasi-instrumentaux (imitatifs), des sons paradoxaux et des arpèges harmoniques qui émanent d’un accord, issus très largement de ses travaux scientifiques [Risset, 1978a ; 1978b ; 1986 ; 1989]. D’une facture très voisine, ces deux pièces utilisent les mêmes matériaux, issus d’un catalogue de sons numériques écrit à la demande de John Chowning en 1969 pour un cours d’introduction à la synthèse par ordinateur que ce dernier donnait à l’Université Stanford en Californie. Ce catalogue historique compile les expériences de synthèse sonore réalisées par Risset au sein des Bell Telephone Laboratories [EA CD Wergo, 1995]. Il ne cessera dès lors de développer ce qui constituera l’archétype de son œuvre jusque dans les années 1980 : “la composition du son-lui même” [Risset, 1986 ; Risset, 1990]. Ses recherches proposent des concepts révolutionnaires dans le domaine de la synthèse musicale numérique, de la psychoacoustique, ainsi qu’une contribution notable pour l’articulation art, science et technologie.
Contexte compositionnel
De retour en France en 1975, Risset intègre l’équipe du projet Ircam, à la demande de Pierre Boulez. Il y compose la pièce mixte Inharmonique (1977) et la pièce acousmatique Songes (1979) qui est l’accomplissement de son désir de “marier” la richesse et la variété des sons enregistrés par microphone avec le contrôle très précis de la musique électronique sous forme numérique [Arch. PRISM – Risset]. Songes représente l’apogée d’une théorie compositionnelle riche et multiforme déjà présente dans des pièces instrumentales de jeunesses comme Fantaisie (1963) pour orchestre, des œuvres réalisées par ordinateur telles Computer Suite for Little Boy (1968) et Mutations (1969) ainsi que des pièces mixtes comme Dialogues (1975), Inharmonique (1977), Trois moments newtoniens (1977) et Mirages (1978) pour ensemble instrumental mixte de 10 à 25 instruments et bande. Dans Songes, les avancées récentes de l’informatique musicale ont permis l’incorporation des sons de synthèse de son catalogue avec les objets sonores de sa pièce antérieure Mirages, créant ainsi une unité musicale unique. Risset revendique par ailleurs à cette époque l’usage des technologies dites en “temps différé”.
Il est difficile de conférer au son synthétique souplesse, vie, identité. Pourtant, l’enjeu est important, car la synthèse donne des possibilités beaucoup plus ductiles. L’analyse/synthèse nécessaire pour effectuer des modifications internes sur les sons réels est problématique, surtout en temps réel. Et la commande quasi instrumentale des sons synthétiques est peut-être plus prometteuse, en tout cas certainement plus facile dans l’immédiat. [Risset, lettre à Pierre Boulez, 29 septembre 1979, Arch. PRISM – Risset]
Il faut replacer cette citation dans un contexte historique où le clivage entre le temps-réel et le temps différé était très fort. Pour autant, l’objectif essentiel de Songes est de créer de l’inouï, tout autant que des dissolutions d’identités sonores, d’aller du son, dans ses dimensions les plus infinitésimales, au monde onirique, autrement dit d’aller des “sons aux songes” [Guillot, 2008]. Par sa double appartenance disciplinaire, Risset travaille à ce que les théories scientifiques et les options compositionnelles dialoguent comme en boucle de rétroaction [Risset, 1990; 1991]. Songes, dans cette année charnière de 1979 – changement des directeurs de département à l’Ircam – est emblématique de cette fertilisation croisée. “Composer le son lui-même” pour Risset, c’est participer aux recherches en psychoacoustique sur les “espaces de timbres”. Cela passe aussi par l’apport de certaines techniques et notions d’informatique musicale comme les contours de fréquence, les illusions d’espace, le phasing, qui constituent les fondements d’une œuvre considérée comme centrale dans la production musicale de Risset, au point nodal des deux premières périodes créatrices du compositeur (1965-1979 et 1980-1991).
Approche méthodologique
La mention de Songes dans les nombreux textes, articles ou interviews de Risset ne donne que des informations d’ordre poétique, sans jamais réellement entrer dans le détail de l’articulation entre les outils de création et les choix compositionnels. Paradoxalement – au regard de l’intérêt que suscite cette œuvre dans la communauté scientifico-artistique de l’informatique musicale – cette pièce n’a été l’objet que d’une très courte analyse [Koblyakov, 1984], d’un projet d’analyse avorté [Stroppa, 1984] et enfin d’une seule étude universitaire [Rix, 2012]. À signaler qu’une œuvre voisine, Contours (1981), a fait l’objet d’analyses [Di Scipio, 2000 ; 2002]. Aussi, faute de travaux académiques en nombre, nous nous sommes tournés vers les documents de genèse disponibles pour Songes. Conscient des difficultés de l’analyse des “œuvres musicales dont la réalisation fait appel à l’informatique” [Risset, 2001], le compositeur s’est montré soucieux de documenter les matériaux utilisés lors du processus créatif de ses œuvres. Il a ainsi conservé les codes originaux partiels de Songes, ainsi que des schémas et esquisses de composition. L’accès à ces archives a permis d’aborder l’œuvre autrement que par ses enregistrements en stéréophonie et en quadriphonie. En se basant sur les codes originaux Music V de Songes mais aussi ceux d’Inharmonique dévoilés par Denis Lorrain [1980], nous proposons une analyse non pas seulement stylistique ou esthétique, mais aussi technique – au sens des “techniques de composition contemporaines” – de nature à rendre compte de la manière dont art, science et technologie s’articulent et se fertilisent mutuellement. Signalons enfin, que cette analyse est en partie issue de la thèse de João Svidzinski, visant à proposer une modélisation du répertoire de l’informatique musicale [Svidzinski, 2018], afin de l’implémenter dans un cadre créatif, dans une orientation épistémologique voisine de celle de Lorrain.
Présentation générale
Matériaux et outils
Songes a été composée en 1978 et 1979 au sein de l’Ircam à Paris.
Hardware :
- Ordinateur PDP10 de l’Ircam.
Software :
Matériaux :
Échantillons de motifs instrumentaux enregistrés à l’Ircam et ayant servi également pour l’œuvre mixte Mirages (1978).
Échantillons originaux de motifs instrumentaux enregistrés à l’Ircam (sons et motifs de harpe, trombone, flûte, hautbois, clarinette, cor, violon, alto, violoncelle).
Versions stéréophonique et quadriphonique
Songes est une musique diffusée à partir d’un support électronique qui existe suivant deux versions :
Version quadriphonique propice à restituer en situation de concert l’intégralité des illusions d’espace contenues dans la pièce [EA Inédit Ina].
Version stéréophonique correspondant est une réduction bi-piste de l’œuvre originelle et réalisée pour sa diffusion commerciale [EA CD Wergo, 1988].
La version stéréophonique est déconseillée pour une interprétation en concert, en raison de la contradiction potentielle qu’il pourrait exister entre “l’espace interne” fixé par le compositeur via le code, et “l’espace externe” résultant d’une diffusion de type multiplans via un acousmonium en concert [Chion, 1988]. La version quatre pistes qui comprend quatre fichiers audio en format aiff est donc la version de référence pour une exécution en public de Songes sur un dispositif a minima en quadriphonie (d’autres possibilités sont proposées par Svidzinski [2017]). Voici quelques recommandations livrées par Risset en personne et retrouvées dans ses archives :
… avec addendum sur la spatialisation : d’abord frontal à partir de 5’ et surtout 7’11”, les quatre haut-parleurs à égalité : les mouvements illusoires doivent entourer et frôler les auditeurs. [Risset, extrait d’une lettre à Marco Stroppa, 5 juillet 1984, Arch. PRISM – Risset]
Pour la diffusion : le niveau sonore du début (0 à 1’30) doit être tel que les sons instrumentaux aient un niveau réaliste pour l’auditeur. Le niveau devrait ensuite être un peu augmenté, sans être pénible (toutefois, le crescendo vers 6’30 doit atteindre un niveau élevé de puissance). [Risset, Addendum au schéma de Songes, Arch. PRISM – Risset]
Synopsis de l’œuvre
Le titre Songes suggère un univers onirique, le passage graduel d’un monde instrumental à un monde illusoire : “Dans le cadre de Songes, j’ai lié cette idée à une thématique de passage au rêve: au fur et à mesure que la pièce se développe, les éléments sonores deviennent de moins en moins réalistes, de plus en plus oniriques. Non seulement ils évoquent de moins en moins clairement des instruments distincts, mais ils donnent aussi l’impression d’échapper aux limitations physiques” [Guillot, 2008, p. 128]. L’œuvre comporte trois sections intitulées “Mirages”, “Cloches” et “Coda”.
La première partie de la pièce, “Mirages”, correspond à la partie “réaliste” qui va par la suite être progressivement transformée en un monde “illusoire”. Les matériaux sonores proviennent de la pièce mixte éponyme composée l’année précédente. Ils sont ici numérisés, mixés et traités. La synthèse numérique a servi tour à tour à assembler, superposer et tuiler cinq motifs instrumentaux d’environ 2 à 5 secondes. Les motifs ont été enregistrés séparément par les instrumentistes de l’Ensemble Intercontemporain. La modification de la hauteur des échantillons a été réalisée grâce aux fonctionnalités de Music V. Le traitement numérique a rendu possible aussi les effets d’espace. Risset utilise également un système de carte de sons permettant l’exploration d’un espace de trilles avec le logiciel Esquisses conçu par David Wessel et écrit par Bennett Smith.
Dans la deuxième partie, “Cloches”, Risset reprend les objets sonores du catalogue de sons synthétisés pour créer un passage de cloches imaginaires avec la prédominance de sons inharmoniques. Les effets d’espace produisent un jeu de réponse entre l’avant et l’arrière. Les relations intervalliques des motifs de Mirages sont l’empreinte de cette partie, à la fois pour l’organisation du mixage harmonique et pour créer de nouveaux objets sonores. Dans ce passage, tout le spectre de fréquence du grave à l’aigu est rempli (contrairement au début, confiné au registre médium). Les cloches se transforment ensuite en texture fluide, où les sons inharmoniques se fondent les uns dans les autres, sous forme d’accords-gigogne “qui reproduisent entre eux les relations de fréquence existantes entre leurs composantes : cette accumulation forme un crescendo surchargeant le son de fréquences, du grave à l’aigu” [Risset, 1978c].
Dans la troisième partie, “Coda”, le compositeur expose un nouvel élément : une note pédale grave (si b / 58 Hz) enrichi par un effet de phasing formant une nappe sous une volute de sons aigus qui semblent voler dans l’espace. Il recourt de manière originale à la synthèse de Fourier pour composer des contours fréquentiels produisant de sons quasi-naturels. Le résultat de cette procédure ressemble à la morphologie sonore d’un oiseau imaginaire. Dans cette partie, Risset utilise les modules développés par John Chowning pour le traitement de l’espace. La réverbération en association avec le changement de phase (entre les canaux de la gauche et la droite) crée le déplacement spatial de la source sonore ponctuel.
Les figures suivantes offrent une vue synoptique de l’œuvre : la première [Figure 1] est une partition d’écoute réalisée par le compositeur et la seconde est un schéma temporel réalisé par Florence Rix [Figure 2].
Figure 1. Partition d’écoute de Songes réalisée par Risset [© Arch. PRISM – Risset].
Figure 2. Schéma temporel de Songes [Rix, 2012, p. 10].
Techniques compositionnelles
Si Risset poursuit ainsi l’exploration de matériaux et techniques compositionnels développés dans des œuvres antérieures, il ouvre dans Songes de nouvelles directions comme l’interaction entre sons de synthèse et sons acoustiques, par le biais des traitements numériques, approche qu’il poursuivra ensuite notamment dans Sud (1985) et Invisible (1996) [Risset, 1996]. Dans une lettre adressée à Boulez, il détaille quelques unes techniques compositionnelles mises en œuvre dans Songes :
A) Traitement simple de sons réels (instrumentaux) par Music V : mixage/tuilage/changement de fréquence/spatialisation/effet choral/enveloppement.
B) Exploration d’un espace de timbre par Sketchpad (D. Wessel).
C) Définition simple de modulations de fréquence compliquées.
D) Modelage spectral et spatial par une extension du phasing (addition de sons de fréquences très voisines mais inégalement espacées).
[Risset, extrait d’une lettre à Pierre Boulez, 29 septembre 1979, Arch. PRISM – Risset]
À ces notions, nous souhaitons ajouter trois autres approches – E) Simulacre de cloche, F) Contours de fréquence, G) Textures fluides – que nous détaillerons par la suite mais qui permettent dès à présent de proposer un aperçu synthétique de la structure de l’œuvre [Figure 3].
Figure 3. Techniques compositionnelles développées dans chaque partie de Songes et time code relatifs aux versions stéréophonique et quadriphonique.
Le langage Music V
Principe
Avant d’analyser plus en détail tous ces différents aspects de Songes, il est nécessaire de décrire la syntaxe du code du programme Music V, utilisée pour la composition de cette pièce. Music V est un programme issu de la série Music N, développé aux Bell Telephone Laboratories par Mathews et son équipe. L’ensemble de ces programmes fonctionne selon une syntaxe modulaire. Autrement dit, des modules (représentés par un symbole alphanumérique) réalisent des tâches données, comme par exemple la multiplication de deux signaux. La même idée est utilisée dans les programmes de syntaxe sonore plus récents comme Csound et Max, descendants directs de la série de programme Music N.
La logique de ce langage est analogue à la manière classique de faire de la musique. Le code peut être divisé en deux parties basiques : “l’orchestre” et “la partition” (score). La première décrit les paramètres globaux (la fréquence d’échantillonnage, par exemple) et les instruments algorithmiques. La deuxième partie décrit les notes : des instructions temporelles paramétriques qui font appel aux instruments de l’orchestre. En bref, c’est l’entité numérique qui produit le son, jouant ainsi le même rôle qu’un instrument dans un orchestre classique. Dans “la partition”, un script temporel définit les paramètres des instruments (comme la fréquence et l’amplitude) et ordonne l’exécution en suivant un script temporel de chaque instrument, ainsi que la durée de chaque instance.
Figure 4. Exemple de code Music V (a) diagramme en bloc ; (b) représentation d’une enveloppe ; (c) forme d’onde ; (d) partition classique ; (e) code Music V [Mathews, 1969, p.54].
Dans l’algorithme [Figure 4e], l’instrument est construit entre les lignes 1 et 5 – l’instruction “INS 0 1” définie le début et “END” la fin. Il joue ici une seule note dont l’amplitude et la fréquence sont contrôlables grâce à deux oscillateurs “OSC” : la ligne 2 correspond au contrôle de l’amplitude, et la ligne 3, à celui de la fréquence. Ensuite, le signal de sortie du deuxième oscillateur est orienté vers la sortie audio du programme (module “OUT”, ligne 4) générant ainsi le son. Le module “GEN” (lignes 6 et 7) permet de générer les formes d’onde (b) et (c). Enfin le module “NOT” (lignes 8 et 9) permet de déclencher l’instrument 1. Décryptons par exemple la ligne 8 : “NOT 0 1 2 1000 .0128 6.70”. “0” signifie que l’action initialise à l’instant 0 seconde ; “1” signifie qu’il s’agit de l’instrument défini dans la ligne; 2 correspond à la durée en seconde ; “1000”, à l’amplitude relative ; “.0128” à la fréquence de l’oscillateur d’amplitude ; “6.70” à la fréquence de l’oscillateur de fréquence. Pour que le programme soit compilé, l’ordinateur n’a besoin que du code Music V [Figure 4e]. Mais pour une question de visualisation et aussi pédagogique, il est utile de générer la partition classique [Figure 4d] mais surtout un diagramme en bloc [Figure 4a] qui permet d’identifier aisément les modules, les entrées et sorties, ainsi que le flux complet de l’instrument système.
Illustration : les premières secondes de Songes
Figure 5. Code Music V du début de Songes [© Arch. PRISM – Risset].
Ce document [Figure 5] correspond à la première page de code Music V – avec les annotations à la main en crayon de Risset – d’une réduction stéréophonique du début de Songes [Média 1]. La première partie du code sert à définir les paramètres globaux, comme la fréquence d’échantillonnage (25600 Hz – “SAM 25600”) et le nombre de canaux (2 – “CHA 2”). Ensuite, deux instruments jumeaux sont construits (“INS 0 8 et INS 0 7” – le premier pour la gauche et le deuxième pour la droite), ceux-ci réalisant la même tâche, à savoir la lecture de fichiers chargés dans la mémoire de l’ordinateur. “LUM” – module développé par Jean-Louis Richer, chercheur à l’Ircam entre 1977 et 1981 – permet de jouer les fichiers chargés par le module “FIC” – les fichiers sont définis comme “JCR:HP3.MSB”, par exemple. Finalement, une liste d’instances permet de jouer les fichiers temporairement. La ligne “NOT 0 7 8.9 .5 1 1”, par exemple, exécute à l’instant “0”, l’instrument “7” (l’instrument de la droite) qui jouera dans “8.9” secondes le fichier “JCR:HP3.MSB” (motif initial de la harpe) avec un facteur multiplicateur d’amplitude de “0.5” et un facteur multiplicateur de fréquence de “1” (c’est-à-dire, la moitié de l’amplitude de l’échantillon originel et la même fréquence). La ligne de code “NOT 0 8 5 .2 RE/MI 2” correspond à un changement de fréquence : le trille de clarinette (“JCR:TT1CL.MSB”) est transposé sur la note ré. Afin de mieux se représenter le résultat sonore, Risset a aussi établi une transcription solfégique de ce même passage [Figure 6].
Figure 6. Esquisse musicale représentant le début de Songes [© Arch. PRISM – Risset]. La partition prescriptive est ici le code, alors que cette esquisse musicale est une représentation descriptive du rendu sonore.
Média 1. Songes, début de la première partie (00’00”-00’22”) [© EA CD Wergo, 1988].
Dans le deuxième passage de la première partie de Songes [Média 2], les fichiers sont mixés en tuilages allongeant ainsi la durée du passage. L’effet de positionnement spatial est ici très présent : dans la ligne “NOT 3.2 7 4.1 .1 RE/MI 4; NOT 3.3 8 4.1 .1 RE/MI 4”, le même fichier est lu (“JCR.TR2AL.MSB”, un trille d’alto) par l’instrument de gauche et celui de droite mais avec un léger décalage de 100 millisecondes – l’instrument “7” (à gauche) est déclenché à “3.2” secondes, alors que l’instrument “8” (à droite) est déclenché à “3.3” secondes. Il est important de noter que pour charger différents fichiers au cours du code, il faut libérer l’espace dans la mémoire. Par exemple, le passage démarre avec le fichier “JCR:TR1AL.MSB” occupant la place “1” (“FIC 0 1”) ; après 12 secondes (“FIC 12 1”) à la même adresse de mémoire, le fichier “JCR:TB2.MSB” remplace l’ancien. Cela était nécessaire, car à l’époque cette procédure de chargement et de lecture des fichiers était coûteuse en termes de CPU.
Média 2. Exemple de tuilage dans la première partie de Songes (00’46”-01’03”). [© EA CD Wergo, 1995]. Les surlignages en vert et en bleu correspondent respectivement aux canaux gauche et droit.
L’espace des timbres
Organisation du matériau instrumental
Fidèle à ses préoccupations constantes quant aux relations fertiles entre les sons “réel” et les sons simulés [Risset, 1988 ; 1996], le compositeur veut rapprocher dans Songes deux mondes sonores en apparence très différents, celui de sons acoustiques d’origine instrumentale et celui de la synthèse sonore numérique. Dans la première partie de la pièce, les sons instrumentaux sont facilement reconnaissables mais il ne s’agit pas cependant de sons bruts, sans transformation. Nous n’entendons pas la harpe au début de la pièce, mais un objet sonore résultant de traitements numériques. Ainsi, même si l’univers sonore est une représentation du réel, il résulte d’un geste de transformations numériques qui caractérise la pièce dans son intégralité.
Risset repart de certains passages enregistrés de la pièce mixte Mirages : les trilles [Figure 7] – qui sont beaucoup exploités dans le passage de tuilage [Média 2] – et de courts motifs [Figure 8]. Les trilles ont été enregistrés par tous les instruments – violon, cello, alto, harpe, corne, basson, flûte, hautbois, trombone et clarinette – alors que les motifs ont été enregistrés seulement par quelques instruments spécifiques, notamment la flûte [Figure 9].
La logique intervallique de ces objets est le mode 2-1-2-1 [Figure 10]. Cette échelle octatonique, utilisée par des compositeurs comme Rimsky-Korsakov ou Olivier Messiaen joue sur l’alternance entre tons et demi-tons. En commençant par la note ré, la note suivante est un ton au-dessus soit mi; la note suivante un demi-ton au-dessus soit fa; la suivante est un ton au-dessus soit sol, etc. Cependant, Risset ne s’intéresse pas à cette relation d’intervalle dans une perspective mélodique, mais comme composante du timbre. On retrouve cette même idée antérieurement dans Mutations, où la série quasi dodécaphonique n’est pas pensée comme un système, mais plutôt une logique génératrice de timbre.
Figure 7. Trilles enregistrés dans Mirages et utilisés dans Songes [© Arch. PRISM – Risset].
Figure 8. Motifs enregistrés dans Mirages et utilisés dans Songes [© Arch. PRISM – Risset].
Figure 9. Motifs enregistrés uniquement par la flûte [© Arch. PRISM – Risset].
Figure 10. Mode 2-1-2-1 utilisé dans Mirages et dans Songes [© Arch. PRISM – Risset].
Le programme Esquisses
En 1978, alors que Risset travaille à la composition de Mirages, il s’intéresse aux recherches menées par John Grey et David Wessel autour du concept d’espace de timbre [Wessel, 1978]. Le programme Esquisses développé à l’Ircam par Wessel et Bennett Smith servait de “cahier de brouillon” pour classer les timbres. Initialement dénommé Sketschpad, ce programme “permet au musicien d’obtenir une représentation des relations subjectives qu’il perçoit lui-même entre éléments musicaux, et […] se prête à être aussi un cahier d’esquisses” [Risset, 1991, p. 279]. Il était possible de représenter dans un plan cartésien plusieurs échantillons sonores (bien que la représentation dans plusieurs dimensions soit possible, deux dimensions étaient suffisantes pour la plupart de cas). Les premiers essais réalisés par Wessel, utilisaient 24 échantillons, chacun correspondant à l’enregistrement d’un même exemple sonore – avec la même note mi b dans le médium, la même durée et la même intensité – mais avec des instruments différents. Selon un critère auditif, il était possible de classer les échantillons, entre 0 et 10, selon une échelle subjective (0 pour des sons identiques à 10 pour des sons très différentes) et également selon une échelle de niveau d’attaque. L’axe vertical se réfèrait à la distribution d’énergie spectrale – la brillance” du son –, et l’axe horizontal, à la nature du transitoire – “l’attaque” du son.
Figure 11. La carte des sons utilisée dans Songes à l’aide du logiciel Esquisses [© Arch. PRISM – Risset].
La carte de son utilisée dans Songes avec les motifs instrumentaux issus de Mirages [Figure 11] permet de repérer la place des différents échantillons de trille dans cet espace. Le point “V“ par exemple (harpe) est le plus haut suivant l’axe vertical : il s’agit donc du son le plus “brillant”. En revanche le point “K” (trille 1 trombone) qui est le plus bas est donc le moins “brillant”. Le point “L” (trille 2 trombone) est le plus en bas à droite ce qui signifie que l’objet est riche en transitoire d’attaque mais demeure relativement pauvre en brillance. On peut voir ainsi que de manière générale, les instruments à cordes (harpe, violon, alto et cello) occupent la moitié gauche de la carte et ont donc des attaques plus ténues que les instruments à vent (flûte, hautbois, clarinette, basson, hautbois) qui occupent la partie droite de l’espace.
Cette carte a permis au compositeur d’utiliser le timbre comme un paramètre musical discret au même titre que les hauteurs, par exemple, l’idée étant de pouvoir transposer une mélodie de timbres – une Klangfarbenmelodie – comme on peut transposer une mélodie de hauteur. Pour cela, il fallait tracer des “intervalles de timbre” et les transposer en gardant le même écart. On peut voir par exemple que Risset a tracé une ligne – un vecteur – entre le point “U” (harpe) et “O” (alto), ce qui correspond à un “intervalle de timbre”. Ce même intervalle se retrouve entre les points “H” (flûte) et “D” (cor). Le compositeur opère de la sorte des transpositions de timbre analogues à des transpositions de hauteur. Mais le rendu sonore de ces transpositions ne lui a pas donné entièrement satisfaction car elles n’étaient pas aussi clairement perceptibles à l’oreille que des transpositions de hauteur. Or l’écoute demeure chez Risset le moyen le plus efficace de valider n’importe quelle opération musicale [Risset, 1988]. Il n’était donc pas possible pour lui de structurer son discours en fonction de ce critère [Guillot, 2008, p. 86].
Simulacres de cloche
Morphologie
Le simulacre de cloche est sans doute l’une des images sonores les plus emblématiques de la musique de Risset. Dès ses premiers essais de synthèse sonore, il cherche à comprendre le comportement spectral des sons “réels”, en étudiant les sons de cuivre comme la trompette [Risset, 1966] mais aussi ceux produits par les cloches. Les objets sonores résultant de cette recherche reviennent sans cesse dans ses œuvres depuis Computer Suite for Little Boy (1968) jusqu’à Resonant Sound Spaces (2001-02). La publication des codes originaux dans son catalogue de sons de synthèse [Risset, 1969] et dans d’autres articles ainsi que les analyses de pièces faisant appel à la documentation informatique [Lorrain, 1980] ont permis d’étudier la morphologie de ces objets, l’évolution du codage et la manière dont le compositeur se les ré-approprie au fil de ses œuvres.
La seconde partie de Songes met en scène des simulacres de cloches [Média 3]. L’organisation du code est divisée en deux parties basiques [Figure 12] : a) définition des objet, b) commandes pour leur déclenchement temporel. Le compositeur fait – à travers des commentaires dans le texte – via le module “COM” à deux sons de synthèse de son catalogue: “430 Bell” [Média 4] et “420 Gong” [Média 5].
Média 3. Songes, début de la deuxième partie “Cloches” (01’37’’-01’59) [© EA CD Wergo, 1988]
Figure 12. Code Music V de la deuxième partie de Songes [© Arch. PRISM – Risset]
Média 4. Son “430 Bell” du catalogue de Risset [© EA CD Wergo, 1995]
Média 5. Son “420 Gong” du catalogue de Risset [© EA CD Wergo, 1995]
Ces objets témoignent des recherches menées par Risset dans les années 1960 tant dans le domaine de la synthèse sonore que la psychoacoustique. Tout son harmonique peut se décomposer en une somme de composantes sinusoïdales dont les valeurs d’amplitudes indépendantes déterminent le “timbre”. Cependant, cette conception est incomplète car le timbre dépend aussi de l’évolution temporelle de l’énergie sur chaque composante [Figure 13]
Figure 13. Analyse tridimensionnelle réalisée par Patrick Sanchez sur un son de synthèse de cloche. Le temps et la fréquence sont représentés horizontalement alors que l’amplitude est représentée verticalement [Risset, 2001, p. 136].
“Cloche 1280”
Pour restituer le comportement temporel des composantes des sons de cloche, le code fait appel à des structures (module “SV1”), une fonctionnalité de Music V qui permet d’encapsuler des données pour la définition d’objets sonores complexes. La structure inharmonique “1280” de type “cloche” [Figure 14] comporte 9 composantes dont les fréquences (en Hz), durée (en secondes) et amplitude (unité arbitraire) sont indiquées dans la dernière colonne. Le son est joué par l’instrument n°3 et la hauteur perçue correspond à 349 Hz; l’amplitude globale du son est de “975”; alors que la durée totale est celle de la composante la plus longue, soit 24 s.
Figure 14. Code Music V de l’objet sonore “1280” utilisé dans Inharmonique et réalisé ici par Denis Lorrain d’après l’original [Lorrain, 1980].
Dans Songes, c’est l’instruction “PLF 0 6” qui définit les instanciations (diversement transposées) de la structure “1280”. La ligne “PLF 0 6 2 1280 0 0 0 0 3; NOT 16 1 0 100 Sol#; NOT 16.2 1 0 100 FA” [Figure 12b] signale que deux instructions “NOT” s’opèrent sur la structure “1280” avec l’instrument “1”, à une intensité globale “100”. La première est déclenchée à l’instant “16” et la deuxième à l’instant “16.2”. Le chiffre “0” indique que la durée définie n’a pas été modifiée i.e. qu’aucune transposition n’a été opérée. Comme l’amplitude de référence de l’instruction “NOT” est “100”, les amplitudes des composantes, définies dans l’instruction “SV1 0 1280”, seront donc multipliées par le rapport 100/975 (100 correspond à l’amplitude de référence de “NOT” et 975 correspond à l’amplitude globale de la structure “1280”). Finalement, la première instruction est transposée sur sol # (415,3 Hz) et la deuxième sur fa (349 Hz) : toutes les fréquences des composantes sont donc multipliées dans un cas par 415,3/349, et dans l’autre par 349/349.
Avec les codes originaux et avec les informations partagées par le compositeur, il est possible de programmer les mêmes fonctionnalités dans un langage informatique courant (le programme Music V est devenu obsolète dans années 1980 et a été remplacé par d’autres programmes comme CMusic et CSound). Pour la composition de Resonant Sound Spaces, Risset utilise par exemple un patch Max d’Antonio de Sousa Dias réalisant un portage du code original Music V et permettant ainsi la synthèse en temps réel des sons du catalogue original [Risset et al., 2002]. Suivant la même perspective, nous avons conçu des applications web utilisant le langage Faust permettant la resynthèse et l’émulation des objets sonores développés par Risset [Application interactive 1].
Application interactive 1. Resynthèse et émulation de la “Cloche 1280” en langage Faust avec contrôle globale sur les amplitudes, les durées et les fréquences.
Dans les premières décennies de la pratique de la synthèse numérique des sons, la création des sons s’avérait très peu confortable car les ordinateurs mainframes étaient lents et d’un maniement difficile. L’interaction homme/machine se déroulait en temps différé et il pouvait se passer beaucoup de temps entre l’ordre donné à la machine via un système de cartes perforées pour l’entrée, le chargement des données numériques et des mémoires de masse, et enfin l’écoute du résultat compilé. Cette contrainte d’utilisation a influencé la manière de travailler. Il était ainsi courant de réutiliser les mêmes cartes sans aucun changement d’une pièce à l’autre.
Les objets sonores encapsulés avec les structures “SV1” ainsi que les routines algorithmiques “PLF 6”, qui permettent la lecture et la réalisation d’instances des structures, n’ont pas subi de modification considérable au cours de la production du compositeur, même quand les cartes perforées étaient devenues obsolètes. Des morceaux de code sont ainsi repris d’une pièce à l’autre comme les structures “1210”, “1250”, “1280”, “1320”, “1360” et “1400” de Songes qui étaient déjà présentes dans Inharmonique, notamment dans le passage “BELLSB” analysé par Lorrain [1980]. Les objets “1100” et “1150” présents dans la première partie de Songes et construits autour du mode 2-1-2-1 [Figure 12a] sont en revanche nouveaux. Nous les avons nommés “Cloche Mirage 1” et “Cloche Mirage 2”.
“Cloche Mirage 1 et 2”
Dans le code original [Figure 12a], la “Cloche Mirage 1” [Figure 15] correspond à la structure “SV1 0 1100” qui comporte 8 composantes mais dont seules les quatre premières sont indiquées. Après analyse de la “Cloche Mirage 2” [Figure 16] qui correspond à la structure “SV1 0 1150”, il a été possible de restituer les composantes manquantes de la “Cloche Mirage 1” puisque celles-ci s’inscrivent aussi dans le mode 2-1-2-1 complet. La structure globale de ces objets cloche a été re-synthétisée avec le langage Faust. Grâce au contrôle individuel de chaque composante spectrale, il est possible de reproduire les sons de Risset mais aussi de tester de nouvelles variantes [Application interactive 2].
Figure 15. Objet “Cloche Mirage 1”. La partie surlignée en jaune a été complétée à partir de l’analyse de l’objet “Cloche Mirage 2”.
Figure 16. Objet “Cloche Mirage 2”.
Application interactive 2. Resynthèse et émulation des objets “Cloche Mirage” en langage Faust avec contrôle individuel de la fréquence et de l’amplitude des 8 composantes spectrales.
Transposition et mutation
Le mode 2-1-2-1 ne sert pas uniquement à construire des timbres. Risset l’utilise aussi pour transposer les objets sonores et créer des liens entre différentes morphologies. C’est ainsi que s’organise, au début de la deuxième partie de Songes, le tuilage entre les motifs mélodiques instrumentaux et les simulacres de cloche [Média 6]. La sous-routine “PLF 6” décrite auparavant permet d’effectuer une transposition globale. En changeant la fréquence de l’objet, toutes les composantes spectrales vont être à leur tour modifiées de manière proportionnelle.
Média 6. Songes, début de la deuxième partie (01’37”-01’59”) en suivant la transposition des objets sonores à travers la première page de code Music V. Chaque objet stocké dans les structures “SV1” est appelé par “PLF 6” et joué par l’un des instruments, tantôt à gauche (en vert), tantôt à droite (en bleu) [© EA CD Wergo, 1995 / Arch. PRISM – Risset].
La synthèse additive permet au compositeur de transformer les simulacres de cloche en texture mouvante en contrôlant individuellement la répartition de l’énergie dans le temps de chaque composante spectrale. Dans la deuxième partie de l’œuvre, les sons de synthèse imitative de gong et de cloche vont progressivement se dissoudre par le biais d’enveloppes non synchrones permettant d’entendre les partiels sous forme d’arpèges [Risset, 1989]. Mutations met en scène de telles transformations et préfigure ainsi le courant spectral qui émergera dans les années 1970. Au début de cette pièce, le motif mélodique est repris sous forme harmonique, comme un accord, puis sous forme de timbre, comme un pseudo coup de gong dont les composantes spectrales correspondent aux notes de l’accord [Média 7].
Média 7. Début de Mutations (00’00”-00’10”) [© EA CD Ina/GRM, 1987].
Ce principe emblématique de mutation est repris dans Songes. Des composantes de cloches, Risset conserve les partiels en les tirant de la morphologie initiale et en les transformant en textures. Ensuite, les composantes fréquentielles de la texture sont transformées en contours harmoniques, c’est-à-dire des profils fréquentiels qui glissent vers l’aigu (cette technique sera reprise et développée dans la “Coda”). Les relations intervalliques des textures conservent la mêmes liens internes que les objets issus de Mirages, la première partie de Songes. L’analyse spectrale ci-dessous [Média 8] souligne ce processus : l’interpolation entre les moments des cloches et les textures fluides, tout en conservant à nouveau les mêmes relations intervallaires du mode 2-1-2-1.
Média 8. Mutation sonore dans la seconde partie de Songes (03’08”-03’32”) : cloche → cloche-textures → textures-contour harmonique → contour harmonique → texture-mode 2-1-2-1 [© EA CD Wergo, 1995].
Unité stylistique de la “Coda”
Contour de fréquence
Seules deux techniques – contour de fréquence et phasing – sont utilisées par Risset dans la troisième partie de Songes ce qui confère à cette “Coda” une forte unité stylistique. Construire des contours de fréquence revient à créer des profils fréquentiels montants et descendants, technique que le compositeur explorera davantage dans Contours [Risset, 1990, p.6]. Le code développé pour cela est un des algorithmes les plus singuliers de Songes. Le compositeur se sert de la synthèse additive d’une manière totalement originale, non plus pour créer des objets sonores, mais pour créer des profils fréquentiels suivant des formes d’ondes périodiques. L’algorithme “BDS4” met en scène deux instruments jumeaux (“INS 2” et “INS 3”) et un instrument destiné à la réverbération (“INS 50”) [Figure 17]. Un diagramme en bloc a été produit afin de faciliter la compréhension de ce réseau algorithmique [Figure 18].
Figure 17. Code Music V contrôlant le contour de fréquence [© Arch. PRISM – Risset].
Figure 18. Diagramme en bloc de l’algorithme “BDS4”.
L’oscillateur (a) opère avec une fréquence “p8” et avec une forme d’onde qui est ensuite multipliée par elle-même (b). Le fait d’élever une forme d’onde au carré permet de n’avoir que des valeurs positives [Figure 19]. À la sortie de (b), un signal périodique donne des valeurs entre 0 et 1 multipliées par une valeur fixe “p6” qui définira l’axe de la forme d’onde. Dans la première instance de l’algorithme BDS4, elle est égale à 7500 Hz ce qui correspond à la note si b7. L’oscillateur (d) et l’offset (e) – une valeur qui délimite la profondeur de l’oscillateur – peuvent moduler cette valeur “p6”. Cependant, Risset n’utilise pas cette procédure ici préférant laisser la fréquence “p10” toujours à 0 Hz. L’oscillateur génère ainsi une sinusoïde avec la fréquence du module “MLT” (c) [Figure 17]. Cet algorithme génère un contour de fréquence proche de celui d’un chant d’oiseau.
Figure 19. Création d’une forme d’onde unipolaire en multipliant la forme d’onde originale par elle-même.
La complexité de l’algorithme décrit ci-dessus est due aux limitations du programme Music V. Avec les outils disponibles aujourd’hui, le même résultat est obtenu avec une procédure relativement simple [Application interactive 3]. À l’époque de la création de Songes, les possibilités de stockage des mémoires étaient très faibles, et les opérations mathématiques étaient limitées aux fonctions basiques. Le recours à la synthèse additive pour l’obtention de contours de fréquence s’est donc avéré une solution satisfaisante et optimale pour les moyens technologiques de l’époque. Dans le code original “BDS4”, cinq formes d’ondes servent à dessiner des contours de fréquence [Figures 20 et 21]. Dans la “Coda” de Songes, Risset n’utilise que la première.
Application interactive 3. Resynthèse et émulation des contours de fréquence en langage Faust avec contrôle individuel de la fréquence et de l’amplitude de chaque oscillateur, de l’offset de fréquence, du panning et de la réverbération.
Figure 20. Code des formes d’onde de l’oscillateur (a) [© Arch. PRISM – Risset].
Figure 21. Les cinq formes d’onde associées à l’oscillateur (a).
Pédale grave avec phasing
Le phasing explore les battements résultant de la superposition de fréquences très rapprochées. La note pédale de la “Coda” – si b grave de 58 Hz – met en scène un effet de phasing “assez raffiné obtenu relativement simplement et aisément grâce à la seule précision – bien contrôlée – de la synthèse numérique” [Lorrain, 1980]. Malheureusement il n’existe aucune trace du code original Music V concernant la réalisation de cet effet dans cette “Coda”. Nous nous sommes donc tournés à nouveau vers la pièce Inharmonique dans laquelle Risset recourt à une procédure similaire, nommée “PHASE6” [Lorrain, 1980]. Le code utilisé aboutit à la même note qui, dans Songes, est enrichie grâce à l’ajout de huit fréquences voisines étagées par intervalles variant entre 0,01 et 0,04 Hz. Dans Inharmonique, Risset recourt à neuf oscillateurs en parallèle pour générer les neuf composantes de chaque événement [Figure 22]. La fréquence du premier oscillateur correspond à la note si b (58 Hz), alors que les autres ont des fréquences au-dessus et en-dessous de cette fréquence centrale suivant le même écart fréquentiel. Par exemple, si l’intervalle est de 0,01 Hz, les fréquences des autres oscillateurs seront 58,01 Hz, 57,99 Hz, 58,02 Hz, 57,98 Hz et ainsi de suite. Cette procédure produit une “cascade d’harmoniques” rapprochés qui entrent en phase et en opposition de phase ce qui a pour effet de les amplifier et de les atténuer [Application interactive 4].
Figure 22. Diagramme en bloc de “PHASE6” dans Inharmonique [Lorrain, 1980].
Application interactive 4. Émulation de l’effet phasing en langage Faust avec contrôle de la fréquence de référence et de l’intervalle fréquentiel.
Écriture de l’espace
Nonobstant le fait que la dimension de l’espace est au cœur de toute œuvre électronique et électroacoustique, le traitement de l’espace joue dans Songes un rôle essentiel pour son unité, tant son usage est présent tout au long de la pièce. Comme nous l’avons mentionné à plusieurs reprises, pour confectionner des effets stéréophoniques, Risset recourt à des instruments jumeaux dont il contrôle l’amplitude afin de positionner et déplacer les sources virtuelles dans l’espace. Revenons au premier exemple sonore de cette analyse [Média 1] qui dévoilait les premières secondes de Songes. Afin de souligner le travail de spatialisation opéré sur chaque objet sonore, positionné tantôt vers la gauche, tantôt vers la droite, un code couleur apparaît sur le code Music V et la représentation solfégique du rendu sonore [Média 9].
Média 9. Songes, retour au début de la première partie (00’00”-00’22”) [© EA CD Wergo, 1988 / Arch. PRISM – Risset] avec, en animation, le code Music V et la représentation solfégique du rendu sonore. Les parties surlignées en vert et en bleu correspondent respectivement aux instruments diffusés à gauche et à droite.
Dans la “Coda”, Risset recourt à des effets panoramiques pour créer des trajectoires spatiales bien plus développées que dans la première partie de la pièce. Il s’inspire notamment des recherches pionnières de son collègue et ami John Chowning qui avait conçu au début des années 1970 un algorithme de spatialisation produisant des illusions spatiales extrêmement robustes [Chowning, 1971]. Dans le code servant à synthétiser les contours de fréquence [Figure 17] et sa représentation en bloc [Figure 18], deux instruments fonctionnent simultanément (ligne 10 “INS 0 2” et ligne 15 “INS 0 3”). Le premier envoie le signal à gauche, alors que le deuxième envoie le signal à droite. Le premier instrument utilise la forme d’onde “f7” [Figure 23, en haut] dans l’oscillateur (j). Le deuxième, quant à lui utilise la forme d’onde “f8” [Figure 23, en bas] dans l’oscillateur (k). Comme il s’agit de deux formes d’onde opposées, lorsque l’énergie du signal augmente dans un oscillateur, elle est nulle dans l’autre oscillateur. Ainsi, il en résulte un passage progressif du son de la gauche vers la droite. Avant d’entrer dans (j) et (k), un signal identique sort de (h) et prend une route de contournement vers (i), deux modules de réverbération.
Figure 23. Formes d’onde approximatives illustrant l’effet de panning produits par les oscillateurs (j) et (k) dans l’algorithme “BDS4”.
À la fin de Songes, les trajectoires sonores deviennent de plus en plus complexes creusant un espace illusoire qui fait écho aux illusions de hauteur que Risset avait développées à travers ses recherches scientifiques et musicales [Risset, 1978a ; 1978b]. D’un monde réaliste à un monde totalement illusoire, tel est le voyage musical que propose l’écoute de Songes.
Conclusion
Songescorrespond à l’apogée de la première période compositionnelle de Risset qui s’étend de 1964 à 1979. Cette pièce résume à elle-seule l’ensemble les partis pris du compositeur à cette époque: son refus des technologies temps-réel, la reprise de codes écrits dans des pièces antérieures, la recherche d’effets psychoacoustiques liés à l’ambiguïté harmonie/timbre par l’usage de relations intervalliques génératrices de timbres, la création de simulacres de cloches et leur transformation en textures fluides, l’exploration des illusions d’espace de Chowning. MaisSongesest également initiatrice de la seconde période compositionnelle de Risset qui s’étend de 1980 à 1991 et durant laquelle le compositeur ne s’interdira pas d’utiliser des sons enregistrés pour concevoir de nouveaux mondes oniriques. Risset épouse la position du physiologiste Purkinje pour qui l’illusion est une erreur des sens mais aussi une vérité de la perception. L’illusion est omniprésente dans son œuvre musicale et scientifique mais elle s’inscrit dansSonges sans le truchement des technologies temps-réel comme le Disklavier couplé au logiciel Max que l’on retrouve dans sa troisième et dernière période compositionnelle qui s’étend de 1991 à 2016.
L’accès aux codes informatiques est essentiel pour analyser des pièces comme Songes et entrer pleinement dans le processus de création de l’œuvre. L’émulation avec le langage Faust des objets synthétisés par Risset sert non seulement à rendre compte des processus compositionnels mais aussi à promouvoir l’accès aux opérations effectuées avec le langage Music V [Svidzinski et Bonardi, 2018]. Cette approche répond aux vœux de Risset qui a toujours œuvré pour une fertilisation croisée entre art, science et technologie.
Ressources
Textes
[Chion, 1988] – Michel Chion, “Les deux espaces de la musique concrète”, dans Francis Dhomont (éd.), Lien – revue d’esthétique musicale, “L’espace du son I”, Ohain : Éditions Musiques et Recherches, 1988, p. 31-33.
[Chowning, 1971] – John Chowning, “The Simulation of Moving Sound Sources”, Journal of Audio Engineering Society, vol.10, 1971, p. 2-6. (Republié dans Computer Music Journal, vol.1 n°3, 1977, p. 48-52).
[Di Scipio, 2000] – Agostino Di Scipio, “An analysis of Jean-Claude Risset’s Contours”, Journal of New Music Research, vol.29 n°1, 2000, p. 1-21.
[Di Scipio, 2002] – Agostino Di Scipio, “A Story of emergence and Dissolution: Analytical Sketches of Jean-Claude Risset’s Contours”, dans Thomas Licata (éd.), Electroacoustic Music Analytical Perspectives, Westport : Greenwood Press, 2002, p. 151-186.
[Guillot, 2008] – Mathieu Guillot, Jean-Claude Risset : Du Songe au son, Paris : L’Harmattan, 2008.
[Koblyakov, 1984] – Lev Koblyakov, “Jean-Claude Risset : Songes, 1979”, Contemporary Music Review, vol.1 n°1, 1984, p. 183-185. (Traduit en français par Marie-Stella Pari et publié dans L’Ircam, une pensée musicale, Paris : Éditions des Archives Contemporaines, p. 183-185.
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[Mathews, 1963] – Max Mathews, “The Digital Computer as a Musical instrument”, Science – New Series, vol.142 n°3592, 1963, p. 553-557. (Republié dans le livret du CD Computer Music Currents 13 – The Historical CD of Digital Sound Synthesis, Wergo 282 033-2, 1995).
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[Risset, 1989] – Jean-Claude Risset, “Paradoxical Sounds / Additive Synthesis of Inharmonic Tones”, dans Max Mathews et John Pierce (éd.), Current Directions in Computer Music Research, M.I.T. Press, 1989, p. 149-163.
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[Risset, 1996] – Jean-Claude Risset, “Realworld Sounds and Simulacra in my Computer Music”, Contemporary Music Review, vol.15 n°1-2, 1996, p. 29-48.
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[Risset et al., 2002] – Jean-Claude Risset, Daniel Arfib, António de Sousa Dias, Denis Lorrain et Laurent Pottier. “De Inharmonique à Resonant Sound Space : temps réel et mise en espace”, Actes des 19e Journées d’Informatique Musicale, Marseille, 29-31 mai 2002 (en ligne : http://jim.afim-asso.org/jim2002/articles/L10_Risset.pdf).
[Stroppa, 1984] – Marco Stroppa, “Sur l’analyse de la musique électronique”, dans L’Ircam, une pensée musicale, Paris : Éditions des Archives Contemporaines, 1984, p. 187-93. (Traduit en anglais : “The Analysis of Electronic Music”, Contemporary Music Review, vol.1 n°1 “Musical Thought at Ircam”, 1994, p. 175-180).
[Svidzinski et Bonardi, 2018] – João Svidzinski et Alain Bonardi, “Héritage et appropriation analytiques de Jean-Claude Risset : un exemple de modélisation en langage Faust des codes Music V de Songes (1979)”, Résumé des Rencontres internationales du Collegium Musicæ – Jean-Claude Risset Interdisciplinarités, Paris : Ircam, 2018 (vidéo en ligne : https://medias.ircam.fr/embed/media/x5f02f2).
[Svidzinski, 2018] – João Svidzinski, Modélisation orientée objet-opératoire pour l’analyse et la composition du répertoire musical numérique, Thèse de doctorat, Université Paris 8, 2018 (en ligne : https://hal.archives-ouvertes.fr/tel-02045765).
[Rix, 2012] – Florence Rix, Songes (1979) de Jean-Claude Risset – Analyse de la pièce et étude des techniques DSP, Mémoire de Master I, Université Jean Monnet - Saint Etienne, juin 2012.
[Wessel, 1978] – David Wessel, “Timbre Space as a Musical Control Structure”, Rapport Ircam, n°12, 1978 (en ligne : http://articles.ircam.fr/textes/Wessel78a/).
[Veitl, 2010] – Anne Veitl, Falling notes / La chute des notes, Delatour : Sampzon, 2010.
Archives
[Arch. PRISM – Risset] – Fonds Jean-Claude Risset, Laboratoire PRISM (UMR 7061 – France). Le copyright s’applique aux documents numérisés par le laboratoire PRISM.
Enregistrements audio
[EA CD Ina/GRM, 1987] – Jean-Claude Risset, Sud ; Dialogues ; Inharmonique; Mutations, Ina C 1003, 1987]
[EA CD Wergo, 1988] – Jean-Claude Risset, Songes ; Passages ; Little Boy ; Sud, Wergo WER 2013-50, 1988.
[EA CD Wergo, 1995] – Jean-Claude Risset, An introductory Catalogue of Computer Synthesized Sounds, Wergo WER 2033-2, 1995.
[EA Inédit Ina] – Jean-Claude Risset, Songes (version 4 pistes au format aiff, 44,1kHz, 16bit).
Enregistrements vidéo
[EV Risset, 2016] – Jean-Claude Risset, interview à l’occasion du Concert Multiphonies (Ina-GRM) du 24 janvier 2016 (en ligne : https://www.youtube.com/watch?v=-pkTEdxKfRg).
[EV Dars et Papillault, 1999] – Jean-François Dars et Anne Papillault, Jean-Claude Risset, médaille d’Or du CNRS 1999, DVD CNRS (en ligne : https://images.cnrs.fr/video/394).
Remerciements et citations
Remerciements à Jean-Claude Risset in memoriam, qui avait mis à notre disposition ses archives sur l’œuvre Songes avant son décès en 2016.
Pour citer cet article:
João Svidzinski et Vincent Tiffon, “Jean-Claude Risset – Songes”, ANALYSES – Œuvres commentées du répertoire de l’Ircam [En ligne], 2021. URL : https://brahms.ircam.fr/analyses/Songes/