Sebastian Rivas (1975)

We must (2017 -2018)

pour contrebasse et électronique

œuvre électronique, Ircam

  • Informations générales
    • Date de composition : 2017 - 2018
    • Durée : 25 mn
    • Éditeur : Inédit
    • Commande : Ircam-Centre Pompidou

Information sur la création

  • Date : 6 juin 2018
    Lieu :

    France, Paris, Église Saint-Merri, Festival ManiFeste


    Interprètes :

    Florentin Ginot, contrebasse, et Sébastien Naves, réalisation informatique musicale. 

Information sur l'électronique
RIM (réalisateur(s) en informatique musicale) : Sébastien Naves

Observations

Écouter l'enregistrement du concert ManiFeste du 6 juin 2018 à l'Église Saint-Merri : https://medias.ircam.fr/x2ba02d

Note de programme

« But release me from my bands

With the help of your good hands:

Gentle breath of yours my sails

Must fill, or else my project fails,

Which was to please. »

« Affranchissez-moi de mes liens,

Par le secours de vos mains bienfaisantes.

Il faut que votre souffle favorable

Enfle mes voiles, ou mon projet échoue :

Il était de vous plaire. »

Épilogue dit par Prospero de The Tempest de William Shakespeare

Avec cet épilogue adressé au public, l’acteur qui joue Prospero dans The Tempest de William Shakespeare souligne le piège dans lequel la mécanique du théâtre l’a enfermé, et dont seuls les applaudissements du public pourront le libérer. De même, dans We must, le contre- bassiste est prisonnier du dispositif scénique sur lequel il se produit et qui était une contrainte première lors de la commande de la pièce. Plus largement, le compositeur Sebastian Rivas lui-même se voit aujourd’hui prisonnier d’un dispositif musical qu’il aspire depuis quelques années à élargir à d’autres médias (théâtre, danse…) dans une démarche résolument pluridisciplinaire qui trouve ici l’une de ses expressions. La pièce fait donc appel autant à des régimes compositionnels qu’à des régimes performatifs, ouvrant la porte à des temporalités plus lâches que celles d’une partition strictement codée. La démarche d’écriture est ici beaucoup plus théâtrale que musicale: le texte conduit plus qu’il ne détermine la performance. Retravaillé au plateau par le compositeur et son interprète, il porte le corps de ce dernier sur la scène et dans ses interac- tions avec le reste du dispositif, scénique ou élec- troacoustique en temps réel, dans une vision foucaldienne du concept de « dispositif ».

Le titre de l’œuvre lui-même fait référence à ce dispositif, conçu et réalisé par Olivier Defrocourt : un dispositif qui relève de l’installation, avec trois plateformes réparties dans l’espace et équipées chacune de quatre haut-parleurs, sur lesquelles sont posées trois contrebasses différentes. Chacune de ces plateformes est munie de son propre éclairage, par le bas. Dénué d’éclairage zénithal, le dispositif exige une écriture des lumières, en articulation avec le discours théâtro-musical, évoquant pour Sebastian Rivas le poème de Bukowski qui dit :

“we must bring

our own light

to the

darkness

nobody is going

to do it

for us”

“il nous faut

sortir nous-même

des ténèbres

personne ne le

fera

pour nous.”

Prolongeant la réflexion de Prospero, les processus compositionnels à l’œuvre dans We must jouent sur le principe de la séparation. La pièce s’ouvre sur la vision d’un rapport excessivement charnel de l’instrumentiste à son instrument, notamment grâce à une exploration de l’extrême aigu, qui oblige le contrebassiste à « embrasser » sa contrebasse. De là, chaque geste musical ou théâtral nous éloignera de cette fusion: irruption de la voix, abandon de l’instrument, dispute de l’interprète et de son double, passage d’une plateforme à une autre, évolution de la diffusion sonore de l’électronique, d’abord fondu au son de la contrebasse puis envahissant peu à peu tout l’espace, dissociation spatiale de la diffusion des traitements vocaux et instrumentaux – une séparation poussée jusqu’à l’éclatement effectif de tous les éléments constitutifs de la performance.