Lara Morciano (1968)

Raggi di stringhe (2011)

pour violon et électronique

œuvre électronique, Ircam

  • Informations générales
    • Date de composition : 2011
    • Durée : 15 mn
    • Éditeur : édition du compositeur
    • Commande : Ircam - Centre Pompidou
  • Genre
    • Musique soliste (sauf voix) [Violon]

Information sur la création

  • Date : 2 mars 2011
    Lieu :

    Paris, Centre Pompidou, Grande salle


    Interprètes :

    Hae-sun Kang.

Information sur l'électronique
RIM (réalisateur(s) en informatique musicale) : José-Miguel Fernandez
Dispositif électronique : temps réel

Observations

Écouter l'enregistrement du concert du 2 mars 2011 au Centre Georges Pompidou : https://medias.ircam.fr/xa94dfa_raggi-di-stringhe-lara-morciano

Note de programme

Raggi di stringhe, pour violon et électronique, est née du désir de la compositrice italienne Lara Morciano de se confronter à une utilisation extensive des processus de traitement en temps réel, ainsi qu’à leurs applications à certaines situations d’écriture propres à son univers musical. Familière des technologies développées à l’Ircam depuis son passage au Cursus et au stage de composition de l’institut, c’est sa première production intra-muros.

« L’idée de base, dit-elle, était d’écrire une pièce où l’électronique, développée de manière très articulée, serait conçue comme un complément à la virtuosité instrumentale, dans une forte interaction avec le violon. Certains traitements s’intègrent parfaitement à mon langage. La synthèse concaténative, par exemple, en favorise (et valorise) la prolifération rythmique et suggère idéalement la rapide succession d’atmosphères contrastées au cours de la pièce. À l’opposé, les traitements de sons « gelés » ou de filtres et délais spectraux sont mis en œuvre pour travailler des textures suspendues dans des situations de raréfactions sonores. » Pour mieux faire de l’électronique un « complément à la virtuosité instrumentale », l’utilisation d’Antescofo, programme de suivi de partition mis au point par Arshia Cont à l’Ircam, s’est très rapidement imposée. S’appuyant sur des analyses en temps réel du son de l’instrument, un ordinateur est entièrement dédié au suivi du jeu de l’instrumentiste et fait ainsi de l’électronique un musicien à part entière – ou presque –, doué de qualités d’écoute qui étaient pour l’instant l’apanage des êtres humains sensibles et pensants. Il permet en outre de « brouiller plus avant la frontière temps réel/temps différé des traitements informatiques et des écritures d’informatique musicale ». La synchronisation des événements électroniques se fait sans qu’il soit nécessaire pour le réalisateur en informatique musicale, ou pour l’interprète, de les déclencher, et le calcul du tempo instantané permet aussi de déformer ces événements en fonction de l’agogique – en réajustant par exemple la longueur des échantillons.

Lara Morciano a justement l’intention de mettre à l’épreuve cette nouvelle technologie. « Dans certains passages, je joue avec le système, en exigeant de la violoniste de nombreux accelerando et ralentando, dans une idée de déformation du temps qui se transforme de façon synchrone aux processus électroniques. » De même, le logiciel tel qu’il est aujourd’hui ne sait pas encore bien reconnaître des modes de jeu spécifiques (sons jetés, écrasés, saturés, sul ponticello, etc.) couramment utilisés, et cette pièce a donc été l’occasion d’une recherche pour étendre ses capacités. « À terme il faudra, pour ce type d’écriture, utiliser un système qui prenne en compte, pour toute la durée de la pièce, les caractéristiques et qualités spectrales du son, pour que l’ordinateur reconnaisse des signaux (à l’instar de la reconnaissance de geste qui a déjà été exploitée dans diverses productions de l’Ircam) et non des notes isolées, de façon à pouvoir reconnaître des sonorités spécifiques comme les modes de jeux particuliers », ajoute José Miguel Fernandez, réalisateur en informatique musicale de la pièce.

Lara Morciano impose en réalité à l’électronique les mêmes défis qu’à l’instrumentiste : une recherche sur la pulsation et l’articulation rythmique, ainsi que sur la couleur sonore, dans un échange continu de réactions réciproques. « La musique est parcourue par un fort élan directionnel, vecteur de l’écriture et de la recherche sonore. Cette pièce est donc une exploration du son instrumental et de ses possibilités. » Malgré toutes les difficultés instrumentales et techniques, malgré la tension constante, cette pièce de Lara Morciano dégage une lumière solaire, rayonnante. Une fraîcheur et une légèreté pétillante – comme un « air de champagne », vivant et énergique.

Jérémie Szpirglas.