Ces Etudes en duo illustrent un processus nouveau : le pianiste a un « partenaire » – mais un partenaire invisible, virtuel. Un programme d'ordinateur « écoute » ce que joue le pianiste, et y ajoute sa propre partie sur le même piano, mais cette partie n'est pas simplement préenregistrée : elle dépend de ce que joue le pianiste et de la façon dont il le joue. Il s'agit bien d'un duo : le double du pianiste est donc un partenaire sensible, même s'il est informatique et irréel. Les Etudes explorent trois modes de relation temps réel assez simples entre le pianiste et l'ordinateur :
Echo. L'ordinateur fait écho au pianiste, mais il ne s'agit pas d'une simple répétition : les échos sont transposés en hauteur et en tempo, et ils interviennent avec des retards variés. Cette étude tire parti des résonances sur la table d'harmonie des notes jouées par le pianiste aussi bien que par son partenaire virtuel.
Narcisse. Ici la relation s'apparente à la réflexion par un miroir : les intervalles mélodiques sont renversés – une quarte devient une quinte et vice-versa. Le centre de symétrie est une note du clavier qui varie dans le courant de la pièce. La réflexion peut aussi intervenir avec un retard variable.
Mercure. Il s'agit d'une sorte de scherzo dans lequel le pianiste déclenche des arpèges à différentes vitesses. Le tempo des arpèges dépend soit du tempo de certains groupes de notes jouées par le pianiste, soit de la hauteur, soit de l'intensité de son jeu. Les arpèges investissent l'espace des hauteurs un peu à la façon des formes d'un kaléidoscope.
Les trois études sont dédiées à Georges Pludermacher, en hommage à l'éclat et à la profonde musicalité de son jeu, et aussi à sa décision courageuse d'affronter les chausse-trappes de la technologie de pointe.
L'œuvre a été réalisée au Laboratoire de Mécanique et d'Acoustique du CNRS de Marseille. Je remercie la compagnie Yamaha qui a envoyé un Disklavier à Marseille. Les programmes sont réalisés à l'aide de Max.
Jean-Claude Risset.