Celui qui survole à basse altitude au-dessus de Dresde, Baghdad ou Samarcande, est voué à la mort, ou est un ange. La compression des clochers, des pétales de fleurs, des désirs, des hublots, des grands-pères : la densification de ce monde frémissant verdoyant, rayé coloré, coincé entre les manches d'un quart d'heure : cela doit tuer l'aventurier ou l'immortaliser.
Procuste fut un héros et le général Dostom fut un héros. Leurs avions de chasse volèrent plus bas, plus hasardeusement, plus brutalement que tous. Et ils survécurent.
Nous ne sommes pas des guerriers. Les pétales de fleurs foisonnantes, nous ne les déchirons pas, nous nous laissons bouleverser par leur bref parfum passant tourbillonnant. La vitre que découpent les vainqueurs étincelle, reflétant le soleil, dans notre œil fuyant.
Il n'y a de rédemption du vol à basse altitude que la rédemption. Nous sommes voués à la mort. Nous sommes des anges.*
Que signifie le titre, Tiefflug ?
Tiefflug signifie « vol à basse altitude » ou « rasemottes ». L’idée de départ était de décrire ce que voit le pilote d’un avion qui vole en rasemottes, c’est-à-dire cette multitude d’objets qui se succèdent à grande vitesse et en gros plan. De nombreuses informations se bousculent en très peu de temps, mais avec une grande précision de détails.
C’est donc une œuvre dense et intense. Et, je l’espère, une partition excessivement virtuose.**
Martin Grütter*, propos recueillis par Jérémie Szpirglas**.