Dans The Blending Season, une pièce de 1973, j’avais inséré quelques mesures de l’Invention à trois voix en fa mineur de Johann Sebastian Bach (Sinfonia BWV 780) ; toutefois, j’avais rendu cet emprunt méconnaissable. Quelques années plus tard, je constatai en l’écoutant à nouveau que la trace de cette citation suggérait une « disposition harmonique » beaucoup plus (post)romantique que son origine. Presque vingt ans plus tard, cette affinité élective avec l’Invention de Bach sollicita encore une fois mon souvenir et contribua à la création de la pièce Rubato, registres et résonances.
Il s’agit d’une étude sur l’Invention, transformée à travers trois méthodes :
Rubato sur deux niveaux d’abord ; dans l’un, le rubato d’interprétation, même lorsque tout est écrit strictement du point de vue rythmique ; dans l’autre, un rubato conceptuel, qui est aussi une métamorphose radicale des proportions rythmiques du texte de Bach, et conduit à quelque chose de quasiment méconnaissable.
Registres : dans les différents registres, les sons originaux sont déplacés de façon souvent discontinue, ce Rubato, registres et résonances, sur l’Invention en fa mineur de J. S. Bach (1991) qui mène à une transformation des relations harmoniques et à un éloignement du modèle de Bach.
Résonances : à partir de la nature des trois instruments se révèlent dans la dilatation du temps des expériences harmoniques et mélodiques qui se superposent et rendent possibles des relations qui sont évidemment étrangères à l’original.
On ne trouve toutefois dans ma partition aucune note ne provenant pas de Bach. À travers le contrepoint de ces trois méthodes se jouent l’éloignement et le rapprochement constants des dimensions formelles les plus importantes de la pièce. En outre, il n’y a entre ces trois instruments et les trois voix de l’Invention aucune analogie. J’espère qu’il est clair à l’audition que cette étude ne provient pas d’une tendance néotonale ou postmoderne.
Rubato, registres et résonances est dédié à titre posthume au compositeur espagnol Enrique Macias.
Emmanuel Nunes.