D’un point de vue mystique, la présence lumineuse de l’être justifierait – a priori ou a posteriori – son absence. D’un point de vue poétique, on pourrait dire que l’une éclaire l’autre. Ainsi, d’après Léonard de Vinci, « tous les corps mis ensemble et chacun d’eux remplissent l’air ambiant d’une infinité de simulacres ».
Cette relation, ne niant pas le flux du temps, rend toutefois sa direction dépourvue d’importance, car elle fixe le lieu propre de l’être dans l’unité épiphanique de l’instant. Le titre de la pièce se fonde sur un texte de la poétesse israélienne Zelda Schneurson (1914-1984) qui m’a impressionné par sa dimension poétique dans laquelle l’Autre est perçu comme une présence totalisante, un horizon du sens et, en même temps, un moyen de transcendance de soi et du réel. Les deux sections de cette pièce, qui se présente comme possibilité de réalisation d’une architecture de l’invisible, correspondent à la fois à la fonction d’un infinito oltrepassare (franchissement infini) aussi bien qu’à l’interrogation de ces signes et de ces minuscules interstices du temps qui constituent la matière même de l’absence. Ici, la fonction de l’alto solo est de se constituer comme le centre – réel ou virtuel – d’un discours musical qui tend constamment à se briser et à se réfracter vers d’autres directions, à l’intérieur d’une dialectique où l’oubli n’a pas moins d’importance que la mémoire.
Stefano Bulfon.