Pentàlogon Quartet est une réécriture pour quatuor à cordes d’une œuvre antérieure spécialement écrite pour la radio: Pentàlogon, dont le sous-titre « commentaire radio en musique » est une référence explicite à l’un des genres emblématiques d’émission radiophonique – le commentaire sportif.
L’idée à l’origine du livret était en soi un défi: comment bâtir un drame musical à partir d’un des plus célèbres paradoxes du philosophe présocratique Zénon d’Élée : celui d’Achille et la tortue, autrement dit le conflit entre le sens commun et la pensée philosophique. Le compositeur Ivan Fedele et son librettiste, Giuliano Corti, ont ainsi eu recours à de nombreuses solutions inédites qui se sont avérées déterminantes dans l’élaboration de l’œuvre. D’abord, ils ont décidé de mettre en jeu cinq tortues, une pour chacun des fondamentaux logiques servant de base à la pensée d’Anaximandre (le principe physique), de Pythagore (le nombre), d’Héraclite (le concept), de Xénophane (l’indéterminé) et d’Anaxagore (le principe mental). Ensuite, on a donné à la compétition le décor d’un stade imaginaire – le Pentàlogon – résonant des chants enthousiastes des fans et des cris du commentateur radiophonique. Pour ce dernier rôle, un authentique spécialiste a été choisi (Ezio Luzzi lors de la création), lequel lit le texte à son rythme habituel, rapide et impromptu, condensant le contenu conceptuel de la course en une forme extrêmement superficielle de communication, une sorte de grommelot, laissant à la musique (le quatuor à cordes) la charge de porter les concepts.
La traduction des cinq principes philosophiques en autant de processus compositionnels a bouleversé la logique de composition du point de vue poétique et conduit le compositeur à structurer l’œuvre en une suite de cinq mouvements : Fanax (Metallico) ou « dell’Apeiron » (la séparation et l’union des opposés); Pus (E-statico) ou « del Numero » (la formule ésotérique) ; Fert (Scorrevole) ou « del Lògos » (la mutation au sein du permanent) ; Fans (Luminoso) ou « dell’Uno » (la lumière infinie) ; Gramah (Elettrico) ou « dell’Intelletto » (l’ordre qui traverse le chaos).
En réécrivant la partition instrumentale de Pentàlogon pour en faire une œuvre autonome, Fedele a donc donné naissance à son deuxième quatuor à cordes. La structure respecte scrupuleusement le découpage de la première version – et ce deuxième quatuor peut là se comparer à son premier, dans lequel le compositeur avait créé un ensemble formel complexe et organique inscrit dans une temporalité parfaitement structurée. Cette manifestation impérieuse de l’ordre est formellement subordonnée aux thèmes philosophiques sous-jacents de Pentàlogon, mais son influence s’étend ici à la sphère harmonique, au sens des figures musicales, à la caractérisation des gestes physiques et à la clarté des relations entre les instruments. Une cohérence totale, indifférente à l’explosion continue des événements dynamiques imprévisibles, qui renforce au contraire l’idée d’une situation totalement unifiée mais fluide et segmentée.
Ali di Cantor. The Music of Ivan Fedele. Édition réalisée par Cesare Fertonani Milano, Edizioni Suvini Zerboni. Programme ManiFeste-2015 (tr : J.S.).