Einspielung III, Aura (1983-1989), et Versus III (1987-1990) font partie d'un cycle entrepris par Emmanuel Nunes en 1978, et intitulé La Création. Elles forment un ensemble de partitions pour un ou deux instruments – toutes dédiées à la fille du compositeur. Des pièces qui tendent à se regrouper en séries, tout en entretenant des relations privilégiées avec certaines œuvres pour orchestre : elles contiennent presque toutes les matrices mélodiques du cycle.
Einspielung III s'intègre dans un projet de neuf pièces, dont trois seulement ont été réalisées. L'idée initiale était que le violon, l'alto et le violoncelle soient chacun dotés de trois pièces solistes, correspondant à trois types d'organisation du matériau et du discours musical. Dans Einspielung III, cette organisation est ainsi fondée sur des développements linéaires assez amples : des « surmotifs » mélodiques.
Einspielung III s'appuie également sur une « typologie rythmique » comprenant deux « caractères » principaux : des groupes de valeurs régulières, et des groupes irréguliers dont les valeurs sont travaillées selon certaines proportions numériques. Mais Einspielung III s'attache avant tout à la constitution d'un « flux mélodique » dont les récurrences intègrent et caractérisent les différentes parties de la pièce. Un discours qui admet cependant des « parenthèses » – comme celle des glissandos d'harmoniques – qui viennent en interrompre la continuité.
Les trois Einspielungen – ces trois premières pièces pour un instrument seul dont le compositeur a longtemps différé l'écriture – sont le fruit d'une aspiration à « une logique horizontale » reflétant la même « complexité intérieure » qu'une œuvre pour orchestre. Et si elles présentent des difficultés instrumentales certaines, celles-ci sont uniquement des conséquences indirectes des nécessités de l'écriture.
Peter Szendy, programme du Festival d'automne à Paris, cycle Emmanuel Nunes.