L'ensemble est divisé en quatre groupes de quatre instruments. Chacun de ces groupes, répartis dans l'espace, possède une couleur de timbre spécifique. Plusieurs superpositions d'instruments sont possibles et permettent de produire ainsi une grande quantité de couleurs résultantes.
Cette palette de base permet alors d'influencer la couleur et l'intensité de l'instrument soliste (le violoncelle), comme dans les théories des couleurs existant pour les arts visuels où il est écrit que « chaque couleur – unie ou non – est influencée par la couleur du fond sur laquelle elle se détache ».
À titre d'exemple, une des nombreuses conséquences de cette perméabilité, que l'on appelle Simultankontrast (contraste simultané), est qu'un même carré rouge sur un fond noir paraîtra plus clair (et de plus grande surface) que sur un fond blanc. Ce qui est également vrai pour un carré gris.
L'ensemble peut donc souligner, amplifier ou alors contrarier le discours musical du violoncelliste. Il s'agit moins, comme dans un concerto classique, de contrastes entre instrument soliste et orchestre, mais plutôt d'oscillations, d'éclairages changeants ou de mises en perspective.
Le titre de cette cinquième Assonance est tiré du livre de Stig Dagerman, Notre besoin de consolation est impossible à rassasier. Ce qui m'a attiré, c'est l'identité des deux éléments de la phrase «...lorsque mon désespoir me dit : « Perds confiance, car chaque jour n'est qu'une trêve entre deux nuits », la fausse consolation me crie : « Espère, car chaque nuit n'est qu'une trêve entre deux jours »...». À mes yeux, et c'est l'unique raison pour le choix du titre, je retrouvais par la juxtaposition immédiate de ces fragments une sorte de Simultankontrast littéraire, tant à un niveau calligraphique qu'à un niveau sémantique.
Michael Jarrell.
Le Simultankontrast, théorie sur la perméabilité des couleurs mise au point par Johannes Pawlik, définit donc les enjeux de cette œuvre où distance, horizon, mémoire, éclairage et perspective orientent notre perception d'une note centrale, le sol sur lequel ouvre le violoncelle.
Renouvelant le genre du concerto, l'écriture musicale, volontiers verticale, comme en témoigne la lente constitution de la texture initiale, veut confier à la figure, au motif, à la mélodie, une fonction thématique et structurelle : dès lors les techniques d'écriture, travail intervallique dérivé des mécanismes sériels ou superposition complexe de métriques et de subdivisions rythmiques, spatialisation à travers les quatre groupes instrumentaux de figurations ornementales qui acquièrent ainsi leur valeur structurelle ou modification de la perception d'un violoncelle par deux fois réellement soliste (quasi-cadence du concerto classique ou ligne, flèche, continue et immuable) et n'émergeant souvent du tutti que dans le brusque silence des instruments qui l'accompagnent ou le prolongent, la juxtaposition et la conjugaison de ces techniques d'écriture tendent à un perpétuel déplacement sémantique, à un perpétuel entre-deux.
Laurent Feneyrou, extrait du livret du disque Accord.