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Première partie |
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Mondestrunken |
Ivresse de lune |
Colombine Des Mondlichts bleiche Blüten, Die weissen Wunderrosen, Blühn in den Julinächten - O bräch ich eine nur ! Mein banges Leid zu lindern, Such ich dunklen Strome Des Mondlichts bleiche Blüten, die weissen Wunderrosen. gestillt wär all mein Sehnen, Dürst ich so märchenheimlich, So selig leis - entblättern Auf deine braunen Haare Des Mondlichts bleiche Blüten ! |
À Colombine Les fleurs pâles du clair de Lune, Comme des roses de clarté, Fleurissent dans les nuits d'été : Si je pouvais en cueillir une ! Pour soulager mon infortune, Je cherche, le long du Léthé, Les fleurs pâles du clair de Lune, Comme des roses de clarté. Et j'apaiserai ma rancune, Si j'obtiens du ciel irrité La chimérique volupté D'effeuiller sur la toison brune Les fleurs pâles du clair de Lune ! |
Der Dandy Mit einem phantastischen Lichtstrahl Erleuchtet der Mond die krystallnen Flacons Auf dem schwarzen, hochheiligen Waschtisch Des schweigenden Dandys von Bergamo. In tönender, bronzener Schale Lacht hell die Fontäne, metallischen Klangs. Mit einem phantastischen Lichtstrahl Erleuchtet der Mond die krystallnen Flacons. Pierrot mit dem wächsernen Antlitz Steht sinnend und denkt : wie er heute sich schminkt ? Fort schiebt er das Rot und des Orients Grün Und bemalt sein Gesicht in erhabenem Stil Mit einem phantastischen Mondstrahl. |
Pierrot dandy D'un rayon de Lune fantasque Luisent les flacons de cristal Sur le lavabo de santal Du pâle dandy bergamasque La fontaine rit dans sa vasque Avec un son clair de métal. D'un rayon de Lune fantasque Luisent les flacons de cristal. Mais le seigneur à blanche basque Laissant le rouge végetal Et le fard vert oriental Maquille étrangement son masque D'un rayon de Lune fantasque. |
Eine blasse Wäscherin Eine blasse Wäscherin Wascht zur Nachtzeit bieiche Tücher, Nakte, silberweisse Arme Streckt sie nieder in die Flut. Durch die Lichtung schleichen Winde, Leis bewegen sie den Strom. Eine blasse Wäscherin Wascht zur Nachtzeit bleiche Tücher. Und die sanfte Magd des Himmeis, Von den Zweigen zart umschmeichelt, Breitet auf die dunklen Wiesen Ihre lichtgewobnen Linnen - Eine blasse Wäscherin. |
Pierrot au lavoir Comme une pâle lavandière, Elle lave ses failles blanches Ses bras d'argent hors de leurs manches, Au fil chantant de la rivière. Les vents à travers la clairière Soufflent dans leurs flûtes sans anches. Comme une pâle lavandière Elle lave ses failles blanches. La céleste et douce ouvrière Nouant sa jupe sur ses hanches Sous le baiser frôlant des branches, Étend son linge de lumière Comme une pâle lavandière. |
Valse de Chopin Wie ein blasser Tropfen Bluts Färbt die Lippen einer Kranken, Also ruht auf diesen Tönen Ein vernichtungssüchtger Reiz. Wilder Lust Accorde stören Der Verzweiflung eisgen Traum - Wie ein blasser Tropfen Bluts Färbt die Lippen einer Kranken. Heiss und jauchzend, süss und schmachtend, Melancholisch düstrer Walzer, Hastest mir an den Gedanken, Wie ein blasser Tropfen Bluts ! |
Valse de Chopin Comme un crachat sanguinolent De la bouche d'un phtisique, Il tombe de cette musique Un charme morbide et dolent. Un son rouge – du rêve blanc Avive la pâle tunique, Comme un crachat sanguinolent De la bouche d'un phtisique. Le thème doux et violent De la valse mélancolique Me laisse une saveur physique, Un fade arrière-goût troublant, Comme un crachat sanguinolent. |
Madonna Steig, o Mutter aller Schmerzen, Auf den Altar meiner Verse ! Blut aus deinen magren Brüsten Hat des Schwertes Wut vergossen. Deine ewig frischen Wunden Gleichen Augen, rot und offen. Steig, o Mutter aller Schmerzen, Auf den Altar meiner Verse ! In den abgezehrten Händen Hältst du deines Sohnes Leiche, Ihn zu zeigen aller Menschheit - Doch der Blick der Menschen meidet Dich, o Mutter aller Schmerzen ! |
Évocation O Madone des Hystéries ! Monte sur l'autel de mes vers, La fureur du glaive à travers Tes maigres mamelles taries, Tes blessures endolories Semblent de rouges yeux ouverts. O Madone des Hystéries Monte sur l'autel de mes vers. De tes longues mains appauvries, Tends à l'incrédule univers Ton fils aux membres déjà verts, Aux chairs tombantes et pourries, O Madone des Hystéries ! |
Der kranke Mond Du nächtig todeskranker Mond Dort auf des Himmels schwarzem Pfühl, Dein Blick, so fiebernd übergross, Bannt mich wie fremde Melodie. An unstillbarem Liebesleid Stirbst du, an Sehnsucht, tief erstickt, Du nächtig todeskranker Mond Dort auf des Himmels schwarzem Pfühl. Den Liebsten, der im Sinnenrausch Gedankenlos zur Liebsten schleicht, Belustig deiner Strahlen Spiel - Dein bleiches, qualgebornes Blut, Du nächtig todeskranker Mond. |
Lune malade O Lune, nocturne phtisique, Sur le noir oreiller des cieux Ton immense regard fiévreux M'attire comme une musique ! Tu meurs d'un amour chimérique, Et d'un désir silencieux, O Lune, nocturne phtisique, Sur le noir oreiller des cieux ! Mais dans sa volupté physique L'amant qui passe insoucieux Prend pour des rayons gracieux Ton sang blanc et mélancolique, O Lune, nocturne phtisique ! |
Deuxième partie |
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Nacht Finstre, schwarze Riesenfalter Töteten der Sonne Glanz. Ein geschlossnes Zauberbuch Ruht der Horizont - verschwiegen. Aus dem Qualm verlorner Tiefen Steigt ein Duft, Erinnrung mordend ! Finstre, schwarze Riesenfalter Töteten der Sonne Glanz. Und vom Himmel erdenwärts Senken sich mit schweren Schwingen Unsichtbar die Ungertüme Auf die Menschenherzen nieder... Finstre, schwarze Riesenfalter. |
Papillons noirs De sinistres papillons noirs Du soleil ont éteint la gloire, Et l'horizon semble un grimoire Barbouillé d'encre tous les soirs. Il sort d'occultes encensoirs Un parfum troublant la mémoire : De sinistres papillons noirs Du soleil ont éteint la gloire. Des monstres aux gluants suçoirs Recherchent du sang pour le boire, Et du ciel, en poussière noire, Descendent sur nos désespoirs De sinistres papillons noirs. |
Gebet an Pierrot |
Supplique O Pierrot ! Le ressort du rire, Entre mes dents je l'ai cassé : Le clair décor s'est effacé Dans un mirage à la Shakespeare. Au mât de mon triste navire Un pavillon noir est hissé : O Pierrot ! Le ressort du rire, Entre mes dents je l'ai cassé. Quand me rendras-tu, porte-lyre, Guérisseur de l'esprit blessé Neige adorable du passé, Face de Lune, blanc messire, O Pierrot ! Le ressort du rire ? |
Raub Rote, fürstliche Rubine, Blutge Tropfen alten Ruhmes, Schlummern in den Totenschreinen, Drunten in den Grabgewölben Nachts, mit seinen Zechkumpanen, Steigt Pierrot hinab - zu rauben Rote, fürstliche Ruhine, Blutge Tropfen alten Ruhmes. Doch da - strauben sich die Haare, Bleiche Furcht bannt sie am Platze : Durch die Finsternis - wie Augen ! - Sieren aus den Totenschreinen Rote, fürstliche Rubine. |
Pierrot voleur Les rouges rubis souverains, Injectés de meurtre et de gloire, Sommeillent au creux d'une armoire Dans l'horreur des longs souterrains. Pierrot, avec des malandrins, Veut ravir un jour, après boire, Les rouges rubis souverains, Injectés de meurtre et de gloire. Mais la peur hérisse leurs crins ; Parmi le velours et la moire, Comme des yeux dans l'ombre noire S'enflamment du fond des écrins Les rouges rubis souverains ! |
Rote Messe Zu grausem Abendmahle, Beim Blendeglanz des Goldes, Beim Flackerschein der Kerzen, Naht dem Altar - Pierrot ! Die Hand, die gottgeweihte, Zerreisst die Priesterkleider, Zu grausem Abendmahle Beim Biendeglanz des Goldes. Mit segnender Geberde Zeigt er den bangen Seelen Die triefend rote Hostie : Sein Herz - in blutgen Fingern - Zu grausem Abendmahle ! |
Messe rouge Pour la cruelle Eucharistie, Sous l'éclair des ors aveuglants Et des cierges aux feux troublants, Pierrot sort de la sacristie. Sa main, de la Grâce investie, Déchire ses ornements blancs, Pour la cruelle Eucharistie, Sous l'éclair des ors aveuglants, Et d'un grand geste d'amnistie Il montre aux fidèles tremblants Son cœur entre ses doigts sanglants, Comme une horrible et rouge hostie Pour la cruelle Eucharistie. |
Galgenlied Die dürre Dirne Mit langem Halse Wird seine letzte Geliebte sein. In seinem Hirne Steckt wie ein Nagel Die dürre Dirne Mit langem Halse. Schlank wie die Pinie, Am Hals ein Zöpfchen - Wollustig wird sie Den Schelm umhalsen, Die dürre Dirne ! |
La chanson de la potence La maigre amoureuse au long cou Sera la dernière maîtresse, De ce traîne-jambe en détresse, De ce songe d'or sans le sou. Cette pensée est comme un clou Qu'en sa tête enfonce l'ivresse : La maigre amoureuse au long cou Sera sa dernière maîtresse. Elle est svelte comme un bambou ; Sur sa gorge danse une tresse, Et, d'une étranglante caresse Le fera jouir comme un fou, La maigre amoureuse au long cou ! |
Enthauptung Der Mond, ein blankes Türkenschwert Auf einem schwarzen Seidenkissen, Gespenstisch gross - dräut er hinab Durch schmerzenkunkle Nacht. Pierrot irrt ohne Rast umher Und starrt empor in Todesängsten Zum Mond, dem blanken Türkenschwert Auf einem schwarzen Seidenkissen. Es schlottern unter ihm die Knie, Ohnmächtig bricht er jäh zusammen. Er wähnt : es sause strafend schon Auf seinen Sünderhals hernieder Der Mond, das blanke Türkenschwert. |
Décollation La Lune, comme un sabre blanc Sur un sombre coussin de moire, Se courbe en la nocturne gloire D'un ciel fantastique et dolent. Un long Pierrot déambulant Fixe avec des gestes de foire La Lune, comme un sabre blanc Sur un sombre coussin de moire Il flageole, et s'agenouillant, Rêve dans l'immensité noire Que pour la mort expiatoire Sur son cou s'abat en sifflant La Lune, comme un sabre blanc. |
Die Kreuze |
Les croix Les beaux vers sont de larges croix Où saignent les rouges Poètes Aveuglés par les gypaètes Qui volent comme des effrois. Aux glaives les cadavres froids Ont offert d'écarlates fêtes : Les beaux vers sont de larges croix Où saignent les rouges Poètes. lls ont trépassé, cheveux droits, Loin de la foule aux clameurs bêtes, Les soleils couchants sur leurs têtes Comme des couronnes de rois ! Les beaux vers sont de larges croix ! |
Troisième partie |
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Heimweh Lieblich klagend - ein kristallnes Seufzen Aus Italiens alter Pantomime, Klingts henüber : wie Pierrot so hölzern, So modern sentimental geworden. Und es tönt durch seines Herzens Wüste, Tönt gedämpft durch alle Sinne wieder, Lieblich klagend - ein kristallnes Seufzen Aus Italiens alter Pantomime. Da vergisst Pierrot die Trauermienen ! Durch den bleichen Feurschein des Mondes, Durch des Lichtmeers Fluten - schweift die Sehnsucht Kühn hinauf, empor zum Heimathimmel, Lieblich klagend - ein kristallnes Seufzen ! |
Nostalgie Comme un doux soupir de cristal, L'âme des vieilles comédies Se plaint des allures raidies du lent Pierrot sentimental. Dans son triste désert mental Résonne en notes assourdies, Comme un doux soupir de cristal, l'âme des vieilles comédies. Il désapprend son air fatal : A travers les blancs incendies Des lunes dans l'onde agrandies, Son regret vole au ciel natal, Comme un doux soupir de cristal. |
Gemeinheit ! In den blanken Kopf Cassanders, Dessen Schrein die Luft durchzetert Bohrt Pierrot mit Heuchlermienen, Zärtlich - einen Schädelbohrer ! Daraus stopft er mit dem Daumen Seinen echten türkschen Tabak In den blanken Kopf Cassanders Dessen Schrein die Luft durchzetert ! Dann dreht er ein Rohr von Weichsel Hinten in die glatte Glatze Und behäbig schmaucht und pafft er Seinen echten türkschen Tabak Aus dem blanken Kopf Cassanders ! |
Pierrot cruel Dans le chef poli de Cassandre Dont les cris percent le tympan, Pierrot enfonce le trépan, D'un air hypocritement tendre. Le maryland qu'il vient de prendre, Sa main sournoise le répand Dans le chef poli de Cassandre Dont les cris percent le tympan. Il fixe un bout de palissandre Au crâne, et le blanc sacripant, A très rouges lèvres pompant, Fume – en chassant du doigt la cendre Dans le chef poli de Cassandre ! |
Parodie Sticknadeln, blank und blinkend. In ihrem grauen Haar, Sitzt die Duenna murmelnd, Im roten Röckchen da. Sie wartet in der Laube, Sie liebt Pierrot mit Schmerzen, Sticknadeln, blank und blinkend. In ihrem grauen Haar. Da plötzlich - horch ! - ein Wispern ; Ein Windhauch kichert leise : Der Mond, der böse Spötter, Äfft nach mit seinen Strahlen - Stricknadeln, blink und blank. |
Parodie Des aiguilles à tricoter Dans sa vieille perruque grise La duègne, en casaquin cerise, Ne se lasse de marmotter. Sous la treille elle vient guetter Pierrot dont sa chair est éprise, Des aiguilles à tricoter Dans sa vieille perruque grise. Soudain elle entend éclater Les sifflets pointus de la brise : La lune rit de sa méprise, Et ses rais semblent imiter Des aiguilles à tricoter. |
Der Mondfleck Einen weissen Fleck des hellen Mondes Auf dem Rücken seines schwarzen Rockes, So spaziert Pierrot im lauen Abend, Aufzusuchen Glück und Abenteuer. Plötzlich stört ihn was an seinem Anzug, Er beschaut sich rings und findet richtig - Einen weissen Fleck des hellen Mondes Auf dem Rücken seines schwarzen Rockes. Warte ! denkt er : das ist so ein Gipsfleck ! Wischt und wischt, doch - bringt ihn nicht herunter ! Und so geht er, giftgeschwollen, weiter, Reibt und reibt bis an den frühen Morgen Einen weissen Fleck des hellen Mondes. |
Lune moqueuse La lune dessine une corne Dans la transparence du bleu. A Cassandre on a fait ce jeu De lui dérober son tricorne. Le vieillard se promène morne Ramenant son dernier cheveu ; La lune dessine une corne Dans la transparence du bleu. Une fantastique licorne, Dont les naseaux lancent du feu, Soudain mouille de son émeu Cassandre assis sur une borne. La lune dessine une corne. |
Serenade Mit groteskem Riesenbogen Kratzt Pierrot auf seiner Bratsche, Wie der Storch auf einem Beine, Knipst er trüb ein Pizzicato. Plötzlich naht Cassander - wütend Ob des nächtgen Virtuosen - Mit groteskem Riesenbogen Kratzt Pierrot auf seine Bratsche : Von sich wirft er jetzt die Bratsche. Mit der delikaten Linken Fasst den Kahlkopf er am Kragen - Träumend spielt er auf der Glatze Mit groteskem Riesenbogen. |
La sérénade de Pierrot D'un grotesque archet dissonant Agaçant sa viole plate, A la héron, sur une patte ; Il pince un air inconvenant Soudain Cassandre, intervenant, Blâme ce nocturne acrobate, D'un grotesque archet dissonant Agaçant sa viole plate. Pierrot la rejette, et prenant D'une poigne très délicate Le vieux par sa roide cravate Zèbre le bedon du gênant D'un grotesque archet dissonant. |
Heimfahrt |
Départ de Pierrot Un rayon de Lune est la rame, Un blanc nénuphar, la chaloupe ; Il regagne, la brise en poupe, Sur un fleuve pâme, Bergame. Le flot chante une humide gamme Sous la nacelle qui le coupe. Un rayon de Lune est la rame, Un blanc nénuphar, la chaloupe. Le neigeux roi du mimodrame Redresse fièrement sa houppe ; Comme du punch dans une coupe, Le vague horizon vert s'enflamme. - Un rayon de Lune est la rame. |
O alter Duft |
Parfums de Bergame |
Albert Giraud |
Albert Giraud |
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