Josh Levine (1959)

Anyway (2019 -2023)

pour harpe électroacoustique solo et électronique live

œuvre électronique, Ircam

  • Informations générales
    • Date de composition : 2019 - 2023
    • Durée : 34 mn
    • Éditeur : Inédit
    • Commande : Ircam-Centre Pompidou
    • Dédicace : À la mémoire de mon père
  • Genre
    • Musique soliste (sauf voix) [Harpe]
Effectif détaillé
  • harpe

Information sur la création

  • Date : 17 juin 2023
    Lieu :

    France, Paris, Ircam, Espace de projection


    Interprètes :

    Parker Ramsay, harpe

Information sur l'électronique
RIM (réalisateur(s) en informatique musicale) : João Svidzinski (réalisation informatique musicale, Ircam)
Dispositif électronique : temps réel

Note de programme

Cette pièce écrite pour Parker Ramsay est dédiée à la mémoire de mon père. Le fil rouge principal de la pièce est le poème éponyme, Anyway, que j’ai commencé à écrire dans les derniers jours de sa vie, et fini peu après son décès. La pièce s’inspire également du genre du tombeau, qui trouve son origine dans la musique française du XVIIe siècle. L’œuvre est le lieu d’une réflexion sur l’état d’être, à bien des égards surréaliste, dans lequel j’ai pu observer mon père glisser au fur et à mesure de sa lente agonie : la raison vacillante, il avait du mal à ne pas perdre de vue la logique des relations de cause à effet ; et il semblait faire l’expérience d’une désincarnation progressive de l’esprit, dont témoignaient des associations d’idées de plus en plus libres entre différents fils de pensées, de souvenirs et d’imaginaires.
Les éléments électroniques de la pièce remplissent des fonctions variées. Certains relèvent de la « désintégration » de la harpe et de sa dissolution dans l’espace (ce que l’on pourrait aussi considérer comme une forme de transcendance de ses contraintes physiques). Tous contribuent à faire vivre l’expérience du temps comme un labyrinthe. Métaphore de l’érosion progressive de la rationalité normative décrite ci-dessus, les techniques de distorsion et de modulation du son déstabilisent le timbre et l’intonation de la harpe, tout comme l’accord en scordatura microtonale. Les résonances disloquées de harpe, les bruits de pédale, les sons extrinsèques – de l’océan, de la pluie, de chants d’oiseau, de crachotements d’un vieil enregistrement – contribuent tous à créer un environnement acoustique tout à la fois au-delà et contenu dans l’univers de la harpe. J’imagine les éléments acousmatiques comme transformant l’espace de la performance en un vaste corps-esprit qui environne l’auditeur, et le remplissent telle une respiration.
La partie de harpe comme la partie électronique convoquent également certains aspects du tombeau baroque. L’écriture de harpe incorpore des éléments caractéristiques tels que des trilles, des pédales et des motifs répétés. Des éclats empruntés à des pièces richement ornementées de Froberger, Marais et Weiss dérivent dans la pièce, agissant eux-mêmes à la manière d’ornements et de modulateurs. Leur pâle présence invitera, je l’espère, à une plus profonde remémoration.
Le projet s’est transformé en un véritable effort collectif. Il n’aurait jamais pu voir le jour sans Parker Ramsay, son incroyable expertise, son énergie, son esprit d’initiative et son engagement passionné. Le soutien constant de l’Ircam et de sa merveilleuse équipe de production — avec une mention spéciale pour João Svidzinski, dont la perspicacité en informatique, l’oreille attentive et l’expérience de l’interprétation musicale sont devenus des adjuvants intrinsèques au développement de l’œuvre — a été indispensable. Enfin, nous sommes à jamais reconnaissants aux Harpes Camac, qui nous ont généreusement fourni une harpe électroacoustique Big Blue, non seulement pour cette performance, mais durant les mois de recherche, d’échantillonnage et de préparation qui l’ont rendue possible. Je ne les remercierais jamais assez.

Josh Levine, note de programme du concert ManiFeste du 17 juin 2023 à l'Espace de projection de l'Ircam.

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