Christophe Bertrand (1981-2010)

Yet (2002)

pour vingt musiciens

  • Informations générales
    • Date de composition : 2002
    • Durée : 10 mn
    • Éditeur : Suvini Zerboni
    • Commande : Ensemble intercontemporain
    • Dédicace : à Pascal Dusapin
Effectif détaillé
  • 2 flûtes, 1 hautbois, 2 clarinettes, 2 cors, 2 trompettes, 1 trombone, 2 percussionnistes, 1 harpe, 2 pianos, 1 violon, 1 violon II, 1 alto, 1 violoncelle, 1 contrebasse

Information sur la création

  • Date : 29 septembre 2002
    Lieu :

    France, Strasbourg, dans le cadre du Festival Musica


    Interprètes :

    l'Ensemble intercontemporain, direction : Jonathan Nott.

Note de programme

Par « yet » (de l'anglais déjà) il faut entendre le concept d'anticipation ; en effet, la première section de l'œuvre, à la manière de certaines pièces de Steve Reich (Music for 18 musicians, notamment), est un concentré des événements à venir : tous les éléments structurels, moteurs des sections suivantes, ainsi que les champs harmoniques et certains motifs n'existant que par une nécessité de perception de la construction y sont présentés, et seront développés (ou simplement évoqués) plus tard, dans un ordre différent : ces éléments structurels sont respectivement la superposition d'accélérations et de décélérations, une harmonie se mouvant très lentement et se déplaçant dans l'espace scénique, des imitations rythmiques à la manière du déphasage, et enfin une succession d'ostinatos vibrants, stroboscopiques, très virtuoses. Dans cette première section, tout est présenté, raccourci, esquissé, mais rien n'y est dit.

Ces éléments, si opposés voire antagonistes qu'ils puissent être, sont unifiés à la fois par un nombre limité de champs harmoniques (en fait une seule échelle harmonique de plus d'une trentaine de notes, constitués de modules très diatoniques et faussés ou colorés par des micro-intervalles, par les harmoniques naturelles des cordes, etc.), qui circulent tout au long de la pièce, par une énergie « dramatique » sans cesse présente (directionnalité, évolution continue de tous les éléments musicaux), voire croissante (hormis une plage calme et déserte, véritable parenthèse dans la tension de la pièce), ainsi que par un dénominateur commun, à savoir l'utilisation de l'espace scénique et le possible des trajectoires qui s'y développe comme partie intégrante de la composition. Cette utilisation de l'espace se traduit évidemment par une orchestration particulière en quatre groupes de cinq musiciens, chaque groupe étant constitué de deux couples d'instruments et d'un instrument seul (ex. deux flûtes, un hautbois, deux clarinettes) et par une disposition appropriée des couples autour d'un axe central formé par les instruments non dédoublés (hautbois, trombone, contrebasse et harpe).

La structure architecturale est fondée sur le schéma formel du tanka japonais (aba/bb) éclaté sur plusieurs strates selon le modèle fractal : en résulte une imbrication de nombreuses et courtes sous-sections marquées par des éléments simples et reconnaissables (comme les interventions des wood-blocks, évoluant de simples ponctuations à une importance sans cesse plus grande, jusqu'à déboucher sur une véritable cadence) qui jouent sur la mémoire de l'auditeur et lui permettent de percevoir le cheminement de l'œuvre.

Christophe Bertrand