Joël-François Durand (1954)

L'Exil du feu (1989)

pour ensemble et électronique

œuvre électronique, Ircam

  • Informations générales
    • Date de composition : 1989
    • Durée : 20 mn
    • Éditeur : Durand, Paris, nº D et F 14527
    • Commande : Ircam-Centre Pompidou
Effectif détaillé
  • 2 flûtes (aussi 1 flûte piccolo), 1 hautbois, 1 clarinette, 1 clarinette basse, 2 bassons (aussi 1 contrebasson), 1 cor, 2 trompettes, 1 trombone, 2 percussionnistes, 1 piano (aussi 1 célesta), 1 contrebasse

Information sur la création

  • Date : 23 mai 1991
    Lieu :

    Paris, Centre Georges-Pompidou


    Interprètes :

    l'Itinéraire, direction : Mark Foster.

Information sur l'électronique
Information sur le studio : Ircam
RIM (réalisateur(s) en informatique musicale) : Zack Settel
Dispositif électronique : dispositif électronique non spécifié

Note de programme

Je tiens à remercier chaleureusement plusieurs personnes avec lesquelles j'ai eu des contacts fréquents pour la réalisation de cette œuvre : Marc Battier qui a donné la première impulsion et qui a si souvent arrondi les angles par la suite, Miller Puckette pour son logiciel MAX et ses conseils d'utilisation impromptus, et aussi, bien sûr, mon assistant Zack Settel pour toute son aide, aussi bien technique que musicale, et pour les réserves d'imagination qu'il a déployées depuis le début du projet.
Joël-François Durand

Depuis de nombreuses années, Joël-François Durand travaille sur la notion de processus de révélation. Cette idée selon laquelle le matériau musical de base n'apparaît qu'à la fin du déroulement de l'œuvre a déjà produit trois œuvres : So er pour 20 instruments, Lichtung pour 10 instruments et Die Innere Grenze pour sextuor à cordes. Il s'agit donc, initialement, de jouer avec le matériau jusqu'à sa révélation ultime.

A l'instar de ce projet, L'Exil du feu propose effectivement un matériau de base qui représente une sorte de réservoir des fonctions mélodiques et harmoniques, mais le phénomène de révélation est systématiquement différé, de sorte qu'il ne nous est jamais « révélé ». Du point de vue formel, cette œuvre laisse apparaître deux moments distincts (ou deux parties) ; l'une mélodique (écriture horizontale), se déployant dans un tempo lent, l'autre davantage harmonique (écriture verticale), quittant progressivement le tempo lent pour gagner un élan pulsatoire plus rapide, et surtout, plus dynamique. Pour Joël-François Durand, la première section est musicalement la plus proche du « centre ». Par la suite, le discours ne parvient pas à se reconstruire, à retrouver son unité originale pour atteindre réellement son dévoilement. Cette remarque détermine un aspect important de la forme construite sur une succession de cycles harmoniques et mélodiques : le premier cycle est constitué d'une longue courbe mélodique qui se trouve progressivement enrichie d'accords et de polyphonies secondaires.

C'est à ce niveau que les transformations électroniques se glissent dans le matériau et agissent sur lui, tantôt pour aliéner les éléments mélodiques de leur origine, tantôt pour les en rapprocher. Le travail à l'ordinateur a consisté à créer des matériaux de hauteurs transformées suivant un principe de transposition variable.Ainsi, des courbes mélodiques apparaissant à certains endroits sont-elles « modulées » — au sens où en modulation de fréquence, la fréquence porteuse est modulée par la fréquence modulante — les unes par les autres.

Cette écriture intègre la perception en réalisant des interpolations entre les matériaux originaux transformés jouant un rôle ambigu dans le processus formel, puisqu'il est possible de retrouver ça et là dans la pièce le profil original d'une mélodie affecté d'intervalles et de rythmes différents. La perception distanciée de son point d'origine est liée à la réminiscence.Le titre de l'œuvre – Exil du feu – devient alors éloquent d'une démarche métaphorique où la puissance créatrice (le feu) générant la poussée dyonisiaque du matériau est éloignée du centre (exil). Cette analogie tient lieu de fonction programmatique et formelle.

Note : citations de Joël-François Durand en italique

Danielle Cohen-Levinas, programme du concert Itinéraire, les 23 et 24 mai 1991, Centre Georges-Pompidou.