Karlheinz Stockhausen (1928-2007)

Sirius (1975 -1977)

pour soprano, basse, clarinette basse, trompette et électronique

œuvre électronique

  • Informations générales
    • Date de composition : 1975 - 1977
    • Éditeur : Stockhausen Verlag
    • Opus : 43
Effectif détaillé
  • trompette, soprano solo, clarinette basse, basse solo

Information sur la création

  • Date : 8 août 1977
    Lieu :

    France, Aix-en-Provence, festival.


Information sur l'électronique
Dispositif électronique : sons fixés sur support, spatialisation (bande magnétique 8 pistes et projection du son)

Observations

huit extraits électroniques de 96 minutes chacun peuvent être interprétés séparément :

  • ex. 1 de 43 : Version printemps
  • ex. 2 de 43 : Version été
  • ex. 3 de 43 : Version automne
  • ex. 4 de 43 : Version hiver

Titres des parties

  • Présentation
  • Libra
  • Capricorn
  • Aries
  • Cancer
  • Pont d'automne
  • Annonciation

Note de programme

La composition Sirius, musique électronique et trompette, soprano, clarinette basse, basse commence par la « Présentation » des quatre solistes : basse profonde - trompette - soprano aigu - clarinette basse, qui sont des personnifications musicales des quatre points cardinaux, éléments, sexes, moments de la journée, étapes de la croissance et saisons. Vient ensuite la « Roue » avec les quatre saisons. Puis l'« Annonciation », dont se dégage le message spirituel de Sirius. Présentation - Roue - Annonciation - durent environ 96 minutes.

Sirius, étoile Alpha de la constellation du Canis Major — distante de 8,7 années-lumière de la terre — est le soleil central de notre univers local. 200 millions de soleils tournent avec leurs planètes et leurs lunes autour de Sirius et vivent de sa lumière. Pour les habitants de Sirius, la musique est la forme la plus élevée de toutes les vibrations. C'est la raison pour laquelle, de toutes choses, c'est la musique qui y atteint le degré de développement le plus parfait. Chaque composition musicale de Sirius liée aux rythmes des constellations, aux saisons et aux moments de la journée, aux éléments et aux différences de nature des êtres vivants. La musique que j'ai composée sous le titre de Sirius transmet à notre planète quelques principes musicaux de forme et de composition.

la Roue

La Roue des constellations et des saisons est l'horloge de Sirius, douze mélodies du Zodiaque sont les signes des mois, et selon la saison on commence la Roue par l'une des quatre mélodies principales Ariès ou Cancer ou Libra ou Capricorn. La Roue dure une bonne heure. Les quatre mélodies principales prédominent chacune un quart d'heure environ et les douze mélodies divisent l'heure comme les douze chiffres de l'horloge. La Roue tourne vers la droite. Tout dans la Roue est changement et transformation perpétuels : le rythme, mélodie, le timbre de Ariès - Cancer - Libra Capricorn se métamorphosent indépendamment les uns des autres et parfois ensemble l'un en l'autre.

Lorsqu'il y en a un qui disparaît, il y en toujours un qui apparaît, cependant que les troisième et quatrième mélodies émergent faiblement ou seulement brièvement. Tout procède de ces quatre mélodies. Les huit autres mélodies du Zodiaque n'apparaissent que pour elles-mêmes — a raison de deux par saison —, elles ne sont pas utilisées pour des métamorphoses.

L'Annonciation

L'Annonciation après la Roue, le Nord et le Sud font leurs adieux (duo) et ceux de l'Est et de l'Ouest (duo), et, en quatuor, ils annoncent le message suivant :

« ...Seule cette période de la création possède le privilège pour vous encore indiscernable, d'être le moment unique de l'infini éternel où Moi, créateur de tous les mondes, j'ai adopté entièrement l'enveloppe charnelle de l'homme. Je Me suis choisi, dans le Grand Homme de la Création, ce cocon cosmique, et à l'intérieur de ce cocon, la région dont Sirius est le soleil central. Parmi les 200 millions de soleils qui tournent autour de ce soleil central. J'ai choisi justement votre terre, pour y devenir Moi-même homme... C'est ici que Je veux, pour tous les temps et éternités à venir, éduquer des enfants qui Me soient tout à fait semblables et qui un jour règneront avec Moi sur l'infini tout entier... »

Je me suis consacré à la réalisation de la musique électronique de Sirius dans le studio de la Westdeutscher Rundfunk de Cologne, de juillet 1975 à mars 1977. À l'écoute de cette musique — et principalement de la Roue — on comprendra à quel point la découverte de nouveaux moyens et de nouvelles possibilités de création en musique électronique, peuvent éveiller en nous une conscience tout à fait nouvelle pour l'ouverture aux formes, pour leurs métamorphoses et leurs fusions, ce qui n'aurait jamais été possible avec des moyens musicaux anciens, et qui ne cesse de se rapprocher de l'art de la métamorphose de la nature. La composition Sirius est une œuvre réalisée sur une commande de la République Fédérale d'Allemagne pour l'inauguration de l' « Einstein Spacearium », au Musée de l'Air et de l'Espace, à Washington, à l'occasion du bicentenaire de l'indépendance des États-Unis. L'œuvre est dédiée « To the Pioneers on Earth and in Space » (« Aux Pionniers sur la Terre et dans l'Espace »).

Quatre versions

Sirius peut donc être exécuté dans 4 versions différentes. La Présentation a toujours lieu au début, l'Annonciation toujours a la fin, et la Roue peut tourner : à la Présentation succède Ariès, ou Cancer, ou Libra, ou Capricorn, suivi des trois autres parties, dans l'ordre naturel des saisons. Après la quatrième saison, vient l'un des quatre « ponts » disponibles, qui est identique au début de la Roue (si, dans la version d'Été, on termine par exemple par Ariès, c'est le « pont après Ariès » qui doit suivre.

La version d'Automne est donnée pour la première fois à Paris à l'Ircam en 1982 : Présentation + Libra + Capricorn + Aries + Cancer + Pont d'automne + Annonciation

Chacune des quatre versions possibles donne à l'œuvre un déroulement tout à fait différent. En France nous n'avons jusqu'à présent entendu que la moitié de l'œuvre, en 1976 à la Sainte Chapelle et aux Rencontres internationales de musique contemporaine à Metz, et la seule exécution intégrale de Sirius fut la création de la version d'Été au Centre Sirius lors du Festival d'Aix-en-Provence le 8 août 1977. Je remercie les responsables de l'Ircam de la chance ainsi offerte de donner enfin Sirius, entièrement et dans une version non encore jouée, devant le public parisien.

L'Exécution dans la pratique

Chaque exécution nécessité d'importantes préparations en ce qui concerne les podiums, la technique (installation de 16 haut-parleurs et du pupitre de régie) et l'éclairage (4 X 3 projecteurs pour les solistes et 4 projecteurs additionnels dirigés vers le centre de la salle et utilisés au moment de la procession, dans la section Capricorn ; et surtout, la projection d'un ciel étoilé réaliste projection exacte du ciel dans un planétarium, ou bien imitation approximative de ce ciel, à l'aide de feuilles métalliques finement percées et placées devant des projecteurs de lumière silencieux qui, posés sur le sol, sont orientés vers le plafond et les murs).

Textes

Le compositeur est l'auteur des Textes pour Sirius — mis à part la citation de Jakob Lorber, dans l'Annonciation. Douze textes brefs décrivent les traits de caractère les plus dominants des douze types humains, conformément aux douze signes du Zodiaque. Toutes les autres paroles sont des innovations, des explications, des corrections, des taquineries, des répliques de défense, des compliments, des stimulations que se font réciproquement les solistes — mais toujours dans le sens de ces textes du Zodiaque.

Lors de chaque exécution, trois langues sont employées : les strophes répétées sont chantées l'une après l'autre ou même simultanément en deux langues différentes, assez souvent avec des transitions (composées de part en part) d'une langue a l'autre. Selon le pays de l'exécution, l'importance relative de chaque langue peut être changée : les parties, qui, maintenant, sont chantées en anglais, le sont alors dans la langue du pays, et celles qui sont chantées en allemand peuvent être chantées dans une seconde langue, laissée au libre choix des exécutants.

Karlheinz Stockhausen, extraits du commentaire de Karlheinz Stockhausen sur Sirius accompagnant l'enregistrement de l'œuvre (DGG)