Fausto Romitelli (1963-2004)

Natura morta con fiamme (1991 -1992)

pour quatuor à cordes et électronique

œuvre électronique, Ircam
Cursus Ircam

  • Informations générales
    • Date de composition : 1991 - 1992
    • Durée : 11 mn
    • Éditeur : Ricordi, Milan, nº 139326
Effectif détaillé
  • violon, violon II, alto, violoncelle

Information sur la création

  • Date : 19 mars 1992
    Lieu :

    Paris, Ircam, Espace de projection, atelier du Cursus de composition


    Interprètes :

    le quatuor Simon : Jérôme Simon, Jérôme Akoka : violons, Frédéric Lainé : alto, Maud Simon : violoncelle.

Information sur l'électronique
Information sur le studio : Ircam, Cursus de composition et informatique musicale.
RIM (réalisateur(s) en informatique musicale) : Fausto Romitelli
Dispositif électronique : dispositif électronique non spécifié, amplification

Note de programme

Le travail de synthèse met le compositeur en face d’une problématique nouvelle : le son comme objet isolé, pré-syntaxique. Pour éclairer l’influence de cette notion sur mon approche compositionnelle, je me servirai d’une métaphore tirée de la critique littéraire : celle du NOM.

On peut penser à une échelle imaginaire : à une extrémité, une langue sans Mots, exclusivement relationnelle, faite d’éléments minimaux, conventionnels et abstraits, qui se réalise par procédés algébriques et combinatoires ; une langue qui se définit comme système de relations et dans laquelle chaque terme « n’est pas dense par lui-même, il est à peine le signe d’une chose, il est bien plus la voie d’une liaison » (Barthes, Le degré zéro de l’écriture) ; à l’autre extrémité de l’échelle, une langue de Mots ou plutôt de Noms, dans laquelle les réseaux de relations sont seulement virtuels, comme émanations des Noms eux-mêmes. Objet absolu, inattendu, objet cratylien par excellence, le Nom « n’a plus qu’un projet vertical, il est comme un bloc, un pilier qui plonge dans un total de sens, de réflexes et de rémanences : il est un signe debout… il institue une Nature interrompue qui ne se révèle que par blocs… un discontinu d’objets solitaires et terribles » (ibidem).

Si le son de synthèse est une image sonore fusionnée, singulière et complexe, articulée en son intérieur, qui se donne complètement à l’intuition et reste opaque à l’analyse, alors la langue de la synthèse est une langue de Noms.

Le Nom établit une narration. « …chaque nom contient plusieurs scènes surgies d’abord d’une manière discontinue, erratique, mais qui ne demandent qu’à se fédérer et à former de la sorte un petit récit, car raconter, ce n’est jamais que lier entre elles, par procès métonymique, un nombre réduit d’unités pleines. » (Barthes, ibidem).

Le Nom définit un espace. Si le timbre intègre lui-même les notions traditionnelles d’harmonie et de rythme, l’espace est la mise en perspective du timbre : l’écriture établit un système de relations-oppositions entre localisation et diffusion, surface et transparence ; c’est de la même façon que médium coloré et objet s’influencent mutuellement, l’un changeant la perception de l’autre.

Ludwig Wittgenstein : Remarques sur les couleurs

142. Les différentes « couleurs » n’ont pas toutes le même lien avec le voir spatial.

144. Ce lien est sans doute celui qu’il y a entre la spatialité, l’ombre et la lumière.

145. On ne peut pas dire non plus que le blanc soit essentiellement la propriété d’une surface (visuelle). Car on pourrait imaginer que le blanc se produisît simplement comme reflet ou comme la couleur d’une flamme.

Fausto Romitelli.