Luigi Nono (1924-1990)

Como una ola de fuerza y luz (1971)

pour soprano, piano, orchestre et bande magnétique

œuvre électronique

  • Informations générales
    • Date de composition : 1971
    • Durée : 30 mn
    • Éditeur : Ricordi
    • Dédicace : a Luciano Cruz para vivir
    • Livret (détail, auteur) :

      « Luciano» de Julio Huasi

Effectif détaillé
  • solistes : soprano solo, piano
  • 4 flûtes (aussi 4 flûtes piccolos), 4 hautbois, 6 clarinettes (aussi 2 clarinettes basses), 6 bassons (aussi 2 contrebassons), 6 cors, 4 trompettes, 6 trombones (aussi 2 trombones contrebasse), tuba, timbales, percussionniste, harpe [amplifiée] , 12 violons, 12 violons II, 12 altos, 12 violoncelles, 12 contrebasses

Information sur la création

  • Date : 28 juin 1972
    Lieu :

    Italie, Milan, Teatro alla Scala


    Interprètes :

    Slavka Taskova, soprano ; Maurizio Pollini, piano ; Orchestre du Teatro alla Scala ; Claudio Abbado, direction ; Luigi Nono, régie son

Information sur l'électronique
Dispositif électronique : sons fixés sur support

Observations

Livret : Luigi Nono, d’après le poème « Luciano » de Julio Huasi (1971)

Luciano!
Luciano!
Luciano!
en los vientos azarósos
de esta tierra
seguirás
flameando
joven como la revolucion
en cada carga de tu pueblo
siempre vivo
y cercano
como el dolor de tu partida.

Como una, Luciano!,
ola
de fuerza
joven como la revolucion
siempre vivo
y seguirás flameando
luz
para vivir.

Voces de niños
doblen
campanas dulces
por
tu juventud.


Luciano !
Luciano !
Luciano !
dans les vents aventureux
de cette terre
tu ne cesseras de jeter
ta clarté
jeune comme la révolution
dans chaque lutte de ton peuple
toujours vivant
et proche
comme la douleur de ton départ.

Comme, Luciano !,
une onde
de force
jeune comme la révolution
toujours vivant
tu ne cesseras de jeter
ta lumière
pour vivre.

Voix d’enfants
s’unissent
aux douces cloches
pour
ta jeunesse.

Note de programme

Entre le mois d’avril et de juin 1971, suite à l’élection démocratique en faveur du gouvernement de Salvador Allende, Luigi Nono se rendit au Chili. Durant son séjour, il rencontra de nombreux artistes, compositeurs et politiciens, parmi lesquels Luciano Cruz Aguayo, un des dirigeants du Mouvement de la gauche révolutionnaire (MIR, Movimiento de Izquierda Revolucionaria). De retour en Italie, Nono se mis à l’écriture de sa nouvelle composition musicale, une œuvre pour piano et orchestre dédiée à Maurizio Pollini et Claudio Abbado.

En août 1971, Nono et Pollini commencèrent les sessions d’enregistrement pour cette nouvelle pièce au Studio di Fonologia della RAI à Milan, en expérimentant avec diverses sonorités au piano et des possibilités de traitement électronique, en vue d’une création pour bande. Peu après, la nouvelle de la mort accidentelle de Luciano Cruz Aguayo se répandit, bouleversant complètement les plans que Nono avait pour sa composition. La « présence dans l’absence » de Luciano fut choisi comme nouvelle ligne directrice, le poème commémoratif de Julio Huasi servant d’inspiration pour les paroles, le titre et le programme, qui se veut volontairement dramatique.

Como una ola de fuerza y luz devint ainsi une sorte de requiem laïc, débutant par l’annonce musicale de la mort de Luciano (Prélude), suivie d’une lamentation prolongée en trois parties (Invocation, Lamentation, Remémoration), puis d’une représentation de la lutte de Luciano face à l’appareil d’État (Lutte), d’un appel à l’activisme (La Longue Marche) et enfin d’un Épilogue (Explosion Collective).

La structure particulière du programme implique un certain degré de
« personnification » des instruments : le piano peut ainsi être associé à la figure de Luciano ; la soprano, en tant que figure féminine, peut avoir plusieurs rôles – celui de la mère, de l’amante, ou de la camarade de lutte du héro ; l’orchestre (dans les partitions parfois appelé « spiriti infernali ») devient le monstre que symbolise l’appareil d’État ; et la bande sert de commentateur, qui vient renforcer l’atmosphère et le caractère de chaque section. Ce programme divise la pièce en deux parties principales, constituées chacune de deux sections. La première partie illustre de manière symbolique les événements de la vie difficile de Luciano, sa mort et le chagrin que procure sa disparition, tandis que la seconde représente notre attitude face à ces événements et notre capacité à réagir, à mobiliser les forces et l’énergie nécessaires pour faire de la mort de Luciano le catalyseur pour des actions futures.

Paulo de Assis, note de programme du concert ManiFeste du 19 juin 2024 à la Maison de la Radio et de la Musique.