Philippe Manoury (1952)

Zeitlauf (1982)

pour chœur, ensemble et bande magnétique

œuvre électronique, Ircam

  • Informations générales
    • Date de composition : 1982
    • Durée : 57 mn
    • Éditeur : Amphion, Paris
    • Opus : 9
    • Commande : Ville de Paris
    • Dédicace : à Mercedes Gonçalves
    • Livret (détail, auteur) :

      Georg Webern

Effectif détaillé
  • chœur mixte(3 soprano, 3 contralto, 3 ténor, 3 basse)
  • 3 cors, 3 trompettes, 3 trombones, tuba, 2 percussionnistes, cymbalum, orgue électrique [Hammond]

Information sur la création

  • Date : 15 février 1983
    Lieu :

    Paris, Ircam, Espace de Projection


    Interprètes :

    le Groupe Vocal de France, l'Ensemble intercontemporain, direction : Peter Eötvös.

Information sur l'électronique
Information sur le studio : réalisée à l'Ircam
RIM (réalisateur(s) en informatique musicale) : György Kurtág Jr.
Dispositif électronique : temps réel, sons fixés sur support

Note de programme

Zeitlauf a été composé entre mars et décembre 1982. C'est l'aboutissement de toute une période de recherches effectuées à l'Ircam durant l'année précédente. Depuis longtemps j'avais dans l'idée de concrétiser dans une œuvre un processus qui me paraît symboliser l'appareil perceptuel musical. Ce processus admet comme hypothèse deux types de perception extrêmes. La perception – immédiate – liée à la nature des phénomènes au moment où ils se produisent (reconnaissance instantanée des timbres par exemple) et donc ancrée dans le présent, et la perception « réfléchie » qui, elle, rend compte des relations des phénomènes entre eux et fait intervenir la mémoire (donc le passé). Symétriquement à ce dernier type se trouve un autre phénomène, celui de la prévisibilité. Nous essayons de devancer un peu les événements avant qu'ils se produisent (par exemple le début d'une progression – crescendo ou decrescendo – nous fait entrevoir sa fin) et nous anticipons ainsi sur le futur. Seulement les choses se compliquent un peu car la mémoire humaine n'est pas celle d'un ordinateur et transforme les objets mémorisés. C'est le sens premier de Zeitlauf : le temps comme facteur de transformation. En conclusion nous avons deux temps psychologiques extrêmes : celui du présent et de la contemplation, et celui, plus dynamique, de l'action et du mouvement. Voilà en quelques lignes les considérations qui ont servi de départ à la composition de Zeitlauf.

L'œuvre comporte treize sections dont certaines présenteront un type de forme caractéristique différent par rapport au temps (formes séquentielles, cycliques, non-directionnelles, évolutives...). Certaines sections apparaîtront comme des moments prémonitoires où de souvenir d'autres sections. Il y aura donc plusieurs présentations d'une même forme de base mais avec des éclairages différents (présentations latentes, filtrées, contractées, étirées... ). Zeitlauf est écrit pour douze voix, neuf cuivres, trois percussions et un orgue Hammond. À cet ensemble s'ajoute un dispositif électronique en temps réel (le système Buchla) et une bande magnétique de sons synthétisés ou traités par ordinateur.

La bande magnétique est le produit de toute une série de programmes qui, générant un spectre sonore quelconque, en déduit tout l'espace sonore dans lequel il évoluera. J'ai donné à cette méthode le nom de « principe des corrélations ».

Le dispositif électronique assurera d'une part les transformations des sons vocaux et instrumentaux nécessaires à chaque reprise de sections (symbole de la mémoire qui est déformée par le cours du temps) et d'autre part créera des relations à l'intérieur des groupes instrumentaux et vocaux (groupe modulé par un autre). J'ai d'autre part expérimenté divers procédés comme la déduction de timbres en fonction de diverses configurations instrumentales, la création de polyphonies à partir de la voix parlée, interpolations de spectre sonore...

Le texte est de Georg Webern qui l'a écrit spécialement à mon intention. Zeitlauf est dédié à ma femme Mercédes.

Philippe Manoury.

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